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il soit complet pour se produire lui-même, et incomplet pour se produire de lui-même. Or, là est la difficulté ; car s’il existait, il ne deviendrait point, il serait. D’autre part, s’il n’existait pas, il ne produirait pas, puisqu’il n’aurait pas l’être. Celui qui existe toujours, ne se fait pas : il subsiste dans le siècle des siècles. Par conséquent, Dieu n’a point produit les êtres de lui-même, puisqu’il n’appartenait point à sa nature de pouvoir les produire de lui-même.

Que Dieu n’ait pu les créer de rien, Hermogène essaie de le prouver ainsi. Dieu est bon et très-bon. Il veut faire des choses bonnes et très-bonnes comme lui-même ; ou plutôt, Dieu ne veut et ne fait que des choses bonnes et très-bonnes. Il faudrait donc que, conformément à sa nature, tous les êtres qu’il aurait produits fussent bons et très-bons. Or, l’expérience atteste qu’il en a créé de mauvais, ce qui n’a pu provenir de son choix et de sa volonté, parce que, s’il ne consultait que son choix et sa volonté, il ne ferait rien que de convenable et de digne de lui. Il faut en conclure que ce qu’il n’a pu faire par un acte de sa volonté, a été engendré par quelque substance mauvaise, la Matière sans doute.

III. Il ajoute encore : Dieu a toujours été Dieu ; toujours aussi il a été Seigneur ; pas un moment où il n’ait été Dieu. Or, il ne pourrait avoir été toujours Seigneur, non plus que toujours Dieu, si quelque chose n’avait toujours existé autrefois, dont il fût toujours le Seigneur ; donc la Matière a toujours existé avec Dieu.

Hâtons-nous de réduire au néant cette dernière opinion d’Hermogène que j’ai cru devoir ajouter ici à cause de ceux qui ne comprennent pas pourquoi cette addition, afin qu’ils sachent que tous ses autres raisonnements sont aussitôt réfutés que compris. Nous déclarons que le nom de Dieu a de toute éternité résidé en lui-même ; mais il n’en va point ainsi du nom de Seigneur, parce que la nature de l’un et de l’autre diffère. Dieu est le nom de la substance