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L’Esprit[1], à vrai dire, est principalement et proprement l’Église, puisqu’en lui réside la Trinité d’un seul et même Dieu, le Père, le Fils et l’Esprit saint. C’est lui qui forme à lui seul cette Église qui, suivant la parole du Seigneur, existe là où trois personnes sont rassemblées. Ensuite, tous ceux qui ont embrassé la même foi sont appelés du nom d’Église, par notre fondateur et notre consécrateur. Voilà pourquoi l’Église remettra les péchés, il est vrai, mais l’Esprit-Église par l’homme spirituel, et non pas l’Église qui réside dans le corps épiscopal. Ce droit est réservé au Seigneur, et. non à son ministre, à Dieu lui-même, et non à son prêtre.

XXII. Mais toi, tu étends ce privilège jusqu’à la personne des martyrs. Quelques-uns de ta communion n’ont pas plutôt porté des chaînes, si faibles qu’elles soient, dans leur prison nouvelle, qu’aussitôt fornicateurs et adultères de les circonvenir de tous côtés ; partout retentissent les prières ; partout débordent les larmes des hommes les plus souillés ; personne n’achète plus volontiers l’entrée de la prison que ceux qui ont perdu l’entrée de l’Église. Ils font violence à la pudeur des hommes et des femmes, au milieu de ces ténèbres, qui ne sont que trop familières à leurs dissolutions, et ils demandent la paix à des hommes qui ne sont pas sûrs de la leur. D’autres descendent dans les mines, et ils reviennent investis de la communion en sortant d’un lieu où un second martyre est nécessaire pour expier les fautes nouvelles qui ont suivi le martyre. Qui, en effet, tant qu’il vit dans cette chair et ici-bas, est exempt de faute ? Qui peut se proclamer martyr, tant qu’il continue d’habiter ce monde, puisqu’il peut encore se racheter à prix d’argent, et qu’il reste exposé aux soins du médecin ou à la cupidité de l’usurier ?

Mais, je le veux bien ; le glaive est déjà levé sur la tête du martyr ; son corps est étendu sur le gibet ; attaché à une

  1. Tertullien prend ici le mot Esprit dans le sens de substance divine.