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un crime plus abominable que ceux des païens, afin que l’on sût qu’il fallait éviter la fornication.

Enfin, l’Apôtre écrit « pour la perdition de sa chair, » et non pour la souffrance de sa chair, condamnant ainsi la substance elle-même qui avait failli, et qui était tombée dans la mort par la profanation de son baptême, « afin que son ame soit sauvée au jour de Notre-Seigneur, » dit-il. Après cela, il s’agit d’examiner si l’ame de cet homme sera sauvée. Quoi donc ! une ame souillée d’un si grand crime serait sauvée, et la chair n’aurait été livrée à la destruction que pour lui épargner le châtiment ? Si nous sacrifions ainsi la résurrection de la chair, l’opinion contraire conclura que l’âme peut souffrir sans le corps. Il ne lui reste donc plus qu’à l’assimiler à l’Esprit, qui prend naissance dans notre Église, et qu’elle doit rendre sain et sauf au jour du Seigneur, c’est-à-dire pur de toute contagion et de toute souillure, puisqu’elle rejette de son sein le fornicateur et l’incestueux. L’Apôtre, en effet, ajoute : « Ne savez-vous pas qu’un peu de levain aigrit toute la pâte ? » Et cependant la fornication n’était pas un peu, mais beaucoup de levain.

XIV. Après avoir ainsi écarté les questions qui avaient été soulevées, je reviens à la seconde Epître aux Corinthiens, afin de prouver aussi cette parole de l’Apôtre. Il nous suffira de dire que la réprimande adressée à cet homme, quel qu’il fût, ne peut, pour bien des raisons, s’appliquer à la personne d’un fornicateur. Car s’il l’avait livré à Satan, comme il le déclare, pour la perdition de sa chair, il l’avait conséquemment beaucoup plus condamné que réprimandé. Il y en avait donc un autre auquel il voulut que suffît une simple réprimande, puisque le fornicateur avait été, non pas réprimandé, mais condamné par sa sentence. Je te donne, en effet, à examiner si dans la première Epître il y en avait d’autres qui, contristant l’Apôtre par leurs désordres, furent contristés par lui, en recevant de sa bouche les reproches qu’ils avaient mérités,