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engagements qu’il contracte, puis enfin se nourrit de la substance du corps de notre Seigneur dans le pain eucharistique. Le voilà cet Enfant prodigue qui, par le passé, ne connut jamais la sobriété, précoce dissipateur, Chrétien tardif. Voilà celui que les Pharisiens ne voyaient pas sans peine dans la personne des publicains et des pécheurs, abandonner le siècle pour se jeter dans les bras de son père, C’est pour figurer ce mystère seulement qu’il nous est parlé de la jalousie du frère aîné, non pas que les Juifs fussent innocents et soumis à Dieu, mais parce qu’ils enviaient aux Gentils le salut, eux qui auraient dû demeurer toujours la nation chérie du Père céleste. Aussi le Juif gémit-il de la première vocation du Chrétien, mais non de sa seconde réhabilitation[1]. La vocation, en effet, est visible même pour le païen ; quant à la réhabilitation, comme elle se consomme dans le secret de nos églises, elle n’est pas même connue des Juifs.

J’ai donné, si je ne me trompe, des explications plus appropriées à la matière des paraboles, à la convenance des sujets et au maintien de la discipline. D’ailleurs, si dans la brebis, la dragme et les désordres du fils, nos adversaires ne s’opiniâtrent à voir le symbole du Chrétien pécheur, que pour avoir droit de lui remettre l’adultère et la fornication, quand il se repent, il faudra également accorder le pardon à tous les autres péchés capitaux, ou réserver comme irrémissibles l’adultère et la fornication, qui leur ressemblent. Mais j’aime mieux dire qu’il n’est pas permis d’argumenter en dehors du sujet dont il était question. En un mot, s’il était permis de transporter ailleurs le sens de ces paraboles, nous appliquerions plutôt au martyre l’espérance qu’elles font concevoir, parce que le martyre seul pourra

  1. Tertullien entend par la première vocation, le changement qui s’opère dans la conduite par la régularité des mœurs et la pratique des vertus chrétiennes ; par réhabilitation, ou rétablissement, les cérémonies qui consacrent le Chrétien.