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pas. » Il va ici directement contre toi, qui penses que tu es plus riche devant Dieu quand lu manges, que tu t’appauvris quand tu ne manges pas, et qui pars de là pour décrier ces œuvres.

Quel étrange Seigneur tu nous fais encore à ta fantaisie dans ce Christ qui mangeait et buvait partout ! Il n’a pas manqué de jeûner, si je ne me trompe, celui qui disait : « Heureux ceux qui ont faim et soif, » et non pas, heureux ceux qui sont rassasiés ; qui annonçait un aliment, non pas tel que le pensaient ses disciples, mais qui était la consommation de l’œuvre divine : « Travaillez, non pour la nourriture qui périt, mais pour celle qui demeure dans la vie éternelle ; » qui enfin, dans la prière de tous les jours, nous prescrit de demander du pain, et non’les richesses d’Attale. Ainsi, le prophète Isâïe ne nia point qu’un certain jeûne ait plu à Dieu ; mais il a dit quel était le jeûne qui ne lui plaît pas : « Vous suivez vos caprices en vos jours de jeune, et vous exigez durement le fruit de vos travaux. Vous ne jeûnez que pour susciter des procès et des querelles et pour frapper impitoyablement vos frères. Est-ce là un jeûne choisi par moi ? »

Il nomme ensuite le jeûne de son choix. Ne l’avoir point retranché, c’est l’avoir confirmé.

XVI. Il préfère, j’en conviens, les œuvres de la justice, mais non pas toutefois sans le sacrifice d’une ame’brisée par les jeûnes. Toujours est-il qu’il est véritablement le Dieu auquel ne plurent ni le peuple, ni le prêtre, ni le prophète intempérants. Us sont encore debout ces sépulcres de la concupiscence où fut enseveli tout un peuple avide de viandes, qui fut frappé d’une grande plaie en mangeant des cailles. Le vieillard Héli se brise la tête devant les portes du temple ; ses fils succombent sur le champ de bataille ; sa bru expire dans l’enfantement. Ainsi avait mérité de périr une famille sans pudeur, qui frustrait Dieu des sacrifices de la chair. Saméas, homme de Dieu, vint annoncer à l’idolâtrie introduite par le roi Jéroboam, que sa fin approche ;