Page:Tertullien - Œuvres complètes, traduction Genoud, 1852, tome 3.djvu/362

Cette page n’a pas encore été corrigée

se trouver parmi ces dieux adorés sous le nom de démons, toujours assister à ces solennités en l’honneur des princes, toujours respirer des parfums impurs. Elle sortira d’une maison, ornée de lauriers et de flambeaux, que l’on prendrait volontiers pour un repaire honteux, récemment ouvert à la prostitution publique. Elle s’assiéra, avec son époux, parmi des compagnons de débauche, au milieu des tavernes ; elle servira les hommes de la prévarication, elle qui servait autrefois les saints ; et elle ne reconnaîtrait pas les préludes de sa condamnation à venir dans les hommages qu’elle rend à ceux qu’elle est destinée à juger vers la fin des temps ! De quelle main idolâtre attend-elle la nourriture mystérieuse ? à quelle coupe trempera-t-elle ses lèvres ? que chantera dans un banquet son mari païen ? que chantera-t-elle elle-même pour lui plaire ? Ce qu’elle entendra ? des hymnes de théâtre, des chansons de taverne, des paroles impudiques. Mais le souvenir de Dieu, mais l’invocation de Jésus avant le repas, mais les passages des Ecritures saintes pour nourrir la foi, mais l’Esprit saint, mais les rafraîchissements de l’ame, mais la bénédiction au lever de la table, où sont-ils ? Entre époux si différents, tout devient étranger, tout prend un caractère hostile, tout est matière à condamnation ; tout est déchaîné par l’ennemi des hommes pour ruiner le salut.

VII. Que de pareils obstacles environnent les épouses chrétiennes qui demeurent dans un lien infidèle, après leur vocation à la foi, rien de plus vrai ; mais du moins elles ont leur excuse devant Dieu, qui les a surprises dans cette union, puisqu’il « leur fait une loi de la continuer, et parce qu’elles sont fortifiées et reçoivent l’espérance de gagner l’infidèle. » Si un mariage de cette espèce est agréable à Dieu, pourquoi ne finirait-il pas par être heureux et affranchi des tortures, des angoisses, des obstacles et des souillures de la passion ou de l’idolâtrie, un des deux époux étant déjà sous le patronage de la grâce divine ?