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la crainte et la défiance. Or, s’il est vrai que Dieu nous prescrit de le servir, sans l’intervention du prochain, comme sans trouble de notre part, peu importe de quel côté vous péchiez, soit en mettant dans le secret votre mari, s’il le tolère, soit en vous jetant dans le trouble, s’il faut vous précautionner contre sa violence. « Ne jetez pas vos perles devant les pourceaux, est-il dit, de peur qu’ils ne les foulent aux pieds, et que, se retournant, ils ne vous déchirent. » Vos perles, ce sont vos bonnes œuvres de tous les jours. Plus vous chercherez à les dissimuler, plus vous les rendrez suspectes, plus vous attirerez la jalouse curiosité des Gentils. Je vous le demande, réussirez-vous à vous cacher, lorsque vous faites sur votre lit et sur votre corps des signes de croix, lorsque vous soufflez pour chasser l’esprit impur, lorsque vous vous levez la nuit pour aller prier ? Ne s’imaginera-t-il pas que vous pratiquez quelque opération magique ? Déroberez-vous à ses regards ce que vous prenez en secret avant toute nourriture ? S’il vient à découvrir que c’est du pain, ne supposera-t-il pas que c’est ce pain dont on fait tant de bruit ? Et comme il ne peut pénétrer un mystère qu’il ignore, que d’alarmes ! que de soupçons ! Il ne rêve que meurtre, qu’empoisonnements. Quelques-uns supportent le christianisme, dites-vous ; mais dans quel but ? pour fouler aux pieds et opprimer leurs femmes ; pour s’armer du secret dont ils sont maîtres contre des périls qu’ils redoutent, aussitôt qu’elles auront le malheur de leur déplaire. Ils le supportent, mais pour faire de la dot conjugale le prix de leur silence, et prêts à traîner leur compagne devant le magistrat qui n’épie que l’occasion d’une injustice.

VI. Combien de ces épouses infortunées n’ont reconnu leur fatale imprévoyance qu’aux dilapidations de leur patrimoine, ou au sacrifice de leur foi ! La servante de Dieu demeure parmi des occupations étrangères. Que l’année se renouvelle, que le mois recommence, il lui faudra toujours