Page:Tertullien - Œuvres complètes, traduction Genoud, 1852, tome 3.djvu/317

Cette page n’a pas encore été corrigée

Mais enfin pourquoi donc ces révélations ou ces présents ? Serait-ce par hasard que les femmes, sans le secours de ces matières brillantes et ces raffinements de la beauté, n’auraient pas eu de quoi plaire aux hommes ? Mais simples encore et dépourvues de tout ornement, dans leur beauté inculte et native, elles avaient bien pu séduire les anges. Ou bien, leurs célestes fiancés craignaient-ils de passer pour des amants ingrats et peu magnifiques, s’ils n’apportaient aucun présent aux femmes qu’ils avaient choisies pour épouses ? Raison aussi frivole ! Celles qui possédaient des anges n’avaient à ambitionner rien de plus que ces nobles fiançailles. La véritable cause de ces dons, la voici. Se souvenant par intervalles du lieu d’où ils étaient tombés, et regrettant le ciel après les transports de leurs passions, ces anges, s’en prenant à la beauté innocente qui avait occasionné leur chute, pervertirent dans leurs amantes les avantages naturels, sous prétexte de les récompenser, afin que leur félicité ne leur servît à rien, et que, déchues de la simplicité ainsi que de l’innocence primitive, elles encourussent avec eux la colère de Dieu. Ils savaient bien que la vaine gloire, le luxe et le désir de plaire par les sollicitations de la chair déplaisent à Dieu. Les voilà « ces anges que nous devons juger ! » Les voilà ces anges auxquels nous avons renoncé dans notre baptême. Les voilà ces pompes frivoles qui leur ont mérité d’être un jour jugés par l’homme. Que font entre les mains de leurs juges les richesses des coupables ? Qu’y a-t-il de commun entre ceux qui prononceront la sentence et ceux qui la subiront ? Ce qu’il y a de commun, j’imagine, entre Jésus-Christ et Bélial. De quel front montons-nous sur le tribunal pour condamner ceux dont nous convoitons les présents ? Vous aussi, femmes chrétiennes, vous êtes appelées à les juger. La substance angélique qui vous attend là-haut, et qui confondra la race humaine dans un même sexe, vous assure cet honneur. Mais si nous ne préludons pas à l’anathème en condamnant dès ce monde leurs présents, que nous