Page:Tertullien - Œuvres complètes, traduction Genoud, 1852, tome 3.djvu/295

Cette page n’a pas encore été corrigée

prédiction qui transforme la femme en épouse ; il indique seulement que, sans être mariée, elle était sa femme comme étant tirée de sa substance : « Ces os de mes os, dit-il, cette chair de ma chair s’appellera femme. »

De là vient que, par une inspiration secrète de la nature, la divinité de l’ame elle-même a introduit à l’insu des hommes, comme il est arrivé pour beaucoup d’autres choses, soit dans nos actions, soit dans nos paroles, ainsi, que nous le prouverons par l’Ecriture, l’usage où nous sommes de nommer du nom de femmes celles qui sont nos épouses. Toutefois ce langage est souvent impropre ; car les Grecs, qui se servent plus volontiers du mot de femme pour désigner l’épouse, ne laissent pas d’avoir d’autres termes spéciaux pour l’exprimer. Mais j’aime mieux en rapporter la raison au témoignage de l’Ecriture. Ainsi, lorsque par le lien du mariage, les deux parties ne sont plus qu’une seule chair, cette chair de la chair de l’homme, cet os de ses os, s’appelle, conformément à son origine, sa femme depuis qu’elle est devenue son épouse par l’union des deux substances. Conséquemment le nom de femme est le nom que l’épouse tient de sa nature ; celui d’épouse exprime une situation de la femme. Enfin une femme peut ne pas être épouse ; une épouse, au contraire, ne peut pas ne pas être femme, parce qu’il est impossible qu’elle ne le soit pas.

Après avoir imposé à la nouvelle créature son nom de femme, et avoir exprimé ce qu’elle fut d’abord par l’imposition de ce nom, Adam commence à prophétiser lorsqu’il ajoute : « Pour la suivre, l’homme quittera son père et sa mère. » Le nom est aussi distinct de la prophétie que cette prophétie est distincte de la personne d’Eve, puisque ces paroles s’appliquent non pas à Eve elle-même, mais à toutes les femmes dont elle devait être un jour la mère. D’ailleurs Adam ne pouvait quitter ni père ni mère à cause d’Eve, puisqu’il n’en avait point. Ce passage tout prophétique ne regarde donc point Eve, puisqu’il ne peut s’entendre d’