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s’il me faut nommer ensemble le Père et le Fils, je m’exprimerai ainsi : Dieu le Père, Jésus-Christ notre Seigneur. S’agit-il de Jésus-Christ seulement, je pourrai le nommer Dieu avec le même Apôtre : « De qui est sorti selon la chair Jésus-Christ même, le Dieu au-dessus de toutes choses, et béni dans tous les siècles. » Que je parle du rayon lui seul, je l’appellerai soleil. Mais si je nomme le soleil dont il est le rayon, je ne donnerai plus au rayon le nom de soleil. Quoique je ne reconnaisse pas deux soleils, cependant je distinguerai aussi bien le soleil et le rayon, aussi bien deux choses et deux espèces d’une seule et indivisible substance que Dieu et son Verbe, que le Père et le Fils.

XIV. Nous avons encore pour nous aider à maintenir la distinction entre le Père et le Fils le principe qui a déclaré que Dieu est invisible. En effet, lorsque Moïse dans l’Égypte désire voir le Seigneur : « Maintenant donc, si j’ai trouvé grâce devant vous, faites que je vous voie et que je vous connaisse, » il lui est répondu : « Tu ne pourras voir ma face, car l’homme ne me verra point sans mourir. » Qu’est-ce à dire ? Tout homme qui m’aura vu mourra. Nous trouvons cependant que beaucoup virent Dieu, et qu’aucun de ceux qui l’avaient vu n’était mort. Oui, ils avaient vu Dieu selon la capacité de l’homme, mais non suivant la plénitude de la divinité. Il est rapporté que, parmi les patriarches, Abraham et Jacob ; parmi les prophètes, Ezéchiel et Isaïe virent Dieu, et cependant ils ne sont point morts. Conséquemment, ou ils auraient dû mourir s’ils avaient vu Dieu, car « personne ne verra Dieu sans mourir, » ou bien, s’ils ont vu Dieu et ne sont pas morts, l’Ecriture est convaincue de mensonge, soit qu’elle affirme que Dieu est invisible, soit qu’elle déclare qu’il a été vu. Ce sera donc un autre qui était vu, parce que de celui qui était vu on ne peut dire qu’il était invisible. La conséquence veut que par celui qui est invisible, nous entendions le Père, à cause de la plénitude de sa majesté,