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incorporel ? Quant à moi, j’affirme que rien de vide et d’inconsistant n’a pu sortir de Dieu, attendu que ce dont il procède n’est ni vide ni inconsistant, et que ce qui dérive d’une substance infinie ayant fait soi-même de si grandes substances, ne peut manquer de substance. Car il a créé personnellement tout ce qui a été créé par lui. Je le demande : Comment admettre que celui « sans qui rien n’a été fait, » ne soit rien ; que l’inconsistant ait créé le solide ; que le vide ait créé le plein, et l’incorporel le corporel ? En effet, quoiqu’une chose puisse souvent différer de son auteur, toutefois rien ne peut être produit par le vide et le néant. Est-ce donc une chose vaine et chimérique que ce Verbe de Dieu qui a été appelé Fils, qui a été surnommé Dieu : « Et le Verbe était en Dieu, et le Verbe était Dieu ? » Il est écrit : « Tu ne prendras point le nom de Dieu en vain. » Le voilà bien celui « qui ayant en lui l’image de Dieu, n’a point cru que ce fût pour lui une usurpation de s’égaler à Dieu ? » Quelle image de Dieu ? Une image distincte apparemment, mais qui ne laissait pas d’être réelle. Qui niera que Dieu n’ait un corps, quoique « Dieu soit Esprit ? » Car l’Esprit est un corps d’une espèce particulière, avec des formes qui lui sont propres. Les êtres invisibles, quels qu’ils soient, ont dans Dieu leur corps et leur figure, par lesquels ils ne sont visibles qu’à Dieu ; à plus forte raison, ce qui est engendré de sa propre substance ne sera-t-il pas dépourvu de substance. Quelle que soit donc la substance du Verbe, je la déclare une personne, et je revendique pour elle le nom de Fils, et en reconnaissant le Fils, j’en fais un second être distinct du Père.

VIII. A qui s’imaginerait que j’introduis ici la probole, c’est-à-dire l’émanation d’une chose sortant d’une autre, comme l’a fait Valentin quand il tire la multitude de ses Eons d’un Eon primitif, je répondrais, pourquoi donc la vérité ne se servirait-elle pas d’un terme qui est à elle et son patrimoine, par la raison que l’hérésie s’en sert, ou pour