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avez raison de craindre. » Conséquemment, ce n’est pas pour te fournir l’occasion d’échapper au martyre qu’il te recommande la soumission aux puissances, mais pour t’exhorter à bien vivre, parce que les puissances sont les auxiliaires de la justice, et les ministres du jugement divin, qui s’exerce d’avance ici-bas sur les criminels. Ensuite il détermine la nature et les limites de cette soumission : « Rendez à chacun ce qui lui est dû, le tribut à qui vous devez le tribut, les impôts à qui vous devez les impôts, » c’est-à-dire : « Rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu ; » mais l’homme n’appartient qu’à Dieu. Pierre avait dit également : « Tu honoreras le roi. » Mais de quelle manière l’entend-il ? Quand le monarque reste sur son domaine, quand il ne prétend pas aux honneurs divins. Nous aimons aussi notre père et notre mère, pourvu cependant qu’ils ne soient pas mis en parallèle avec Dieu. Au reste, il n’est pas permis de chérir son ame elle-même plus que Dieu.

XV. Eh quoi donc ! les épîtres des Apôtres sont-elles si variables ? Ames simples et colombes innocentes jusqu’ici, nous sommes-nous jetés volontairement dans l’erreur par je ne sais quel désir de vivre ? Qu’il en soit ainsi, je l’accorde. Dépouillons la lettre de son sens légitime. Toutefois, nous connaissons les tribulations des Apôtres ; cette doctrine est palpable ; pour la comprendre, il me suffit de parcourir le livre des Actes. Je n’en demande pas davantage ; j’y rencontre partout des cachots, des fers, des flagellations, des lapidations, des glaives, des Juifs qui insultent, des nations qui se lèvent avec fureur, des tribuns qui diffament, des rois qui interrogent, des proconsuls qui dressent leurs tribunaux. Qu’est-il besoin du nom de César pour servir d’interprète ? Pierre est mis à mort ; Etienne lapidé, Jacques immolé, Paul étendu sur le chevalet avant d’être décapité ; voilà des faits écrits dans le sang. L’hérétique veut-il des preuves à l’appui de ces livres ? Eh bien !