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TERTULLIEN.

souffle et fut introduit dans ce corps, parce que le Démiurgue ne connaissait pas plus la semence de sa mère que sa mère elle-même. Cette semence, ils l’appellent l’Église, image de l’Église d’en haut, et berceau de l’homme : ils le font donc des cendres d’Achamoth, de même qu’ils tirent l’animal du Démiurgue, le terrestre de la substance primordiale, et la chair de la matière. Nouveau, c’est-à-dire quadruple Géryon, qui se dresse devant toi.

XXVI. Voici la fin qu’ils assignent à chacun d’eux : à la substance matérielle, c’est-à-dire charnelle, qu’ils appellent aussi la gauche, une mort infaillible ; à l’animale, qu’ils nomment par opposition la droite, une vie douteuse, parce que flottant entre la matérielle et la spirituelle, elle doit tomber là où elle aura le plus penché. Mais d’ailleurs ils affirment que la substance spirituelle entre dans la formation de l’animale, afin que celle-ci puisse s’instruire avec sa compagne, et se former en conversant avec elle. L’animal, en effet, manquait de la connaissance des choses sensibles ; voilà pourquoi furent créés les phénomènes de ce monde ; voilà pourquoi Soter prit dans le monde la forme animale, c’est-à-dire pour sauver la substance animale. Par un autre mélange monstrueux, ils veulent qu’il ait revêtu quelque chose des trois substances à l’universalité desquelles il apportait le salut, de sorte qu’il reçut d’Achamoth la substance spirituelle, et du Démiurgue le Christ animal qu’il revêtit bientôt après. D’ailleurs corporel, puisqu’il provenait de la substance animale, mais formé avec un art merveilleux et inénarrable, dans l’œuvre qu’il avait à remplir, il fallut la force pour qu’il s’exposât malgré lui à être abordé, vu et touché par les hommes, aussi bien qu’à mourir. Mais il n’y eut en lui rien de matériel, parce que la matière est exclue du salut, comme s’il avait été nécessaire à d’autres qu’à ceux qui avaient perdu le salut. Et pourquoi ces chimères ? Afin que les Valentiniens, en refusant notre chair au Christ, la déshéritent aussi de l’espérance du salut.