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TERTULLIEN.

sein par une conception spirituelle, devant cette image, que la violence de ses transports et la joie d’une excitation voluptueuse avaient introduite et comme imprimée dans son cœur. Elle enfanta donc. Dès-lors il y eut trois substances qui provenaient de trois causes. La première était matérielle, elle avait son origine dans la passion ; la seconde était animale, elle était fille de la conversion ; la troisième enfin était spirituelle, elle émanait de l’imagination.

XVIII. Plus propre à l’action par l’autorité de ses trois enfants, elle entreprend de perfectionner chacune de ces espèces. Mais elle ne put atteindre la substance spirituelle, parce qu’elle est elle-même spirituelle. Car la ressemblance de nature ne permet point à des êtres égaux et consubstantiels d’agir réciproquement l’un sur l’autre. Dans cette intention, elle borne ses efforts à la substance animale, après avoir produit les lois de Soter. Et d’abord, ô blasphème qu’on ne peut ni prononcer, ni lire, ni entendre sans horreur ! elle produit notre Dieu, le Dieu de tous les hommes, excepté des hérétiques[1], le Père, le Créateur, le Roi de tous les êtres qui sont postérieurs. Tous, en effet, viennent de lui, si toutefois ils viennent de lui et non pas plutôt de cette Achamoth par laquelle, à son propre insu, secrètement et semblable à l’automate qui obéit à l’impulsion extérieure, il était mû dans chacune de ses opérations. En un mot, c’est à cause de cette ambiguïté de personnes dans les œuvres, qu’ils lui ont imposé le nom combiné de Métropator, tandis que toutes ses autres appellations sont distinctes conformément à la nature et à la condition de ses actes, de sorte que pour les substances animées, qu’ils rangent à la droite, ils l’appellent Père, mais que pour les substances matérielles qu’ils relèguent à la gauche, ils le nomment Démiurgue ; et Roi, lorsqu’il s’agit du gouvernement de l’ensemble.

  1. Les Marcionites, qui reconnaissaient un dieu bon et un dieu mauvais.