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TERTULLIEN.
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quelque chose de pareil à leur nombre, ils produisent d’autres fruits, par l’union de leur double nature, et en vertu de leur alliance par conséquent. D’un côté, le Verbe et la Vie mettent au monde une dizaine d’Éons à la fois ; de l’autre l’Homme et l’Église en produisent deux de plus, pour atteindre le nombre des auteurs de leurs jours, parce que ces deux êtres, réunis aux dix autres, forment un nombre égal à celui qu’ils ont procréé. J’écris les noms de la décade : Bythos et Myxis, Agératos et Hènoxys ; Autophyès et Hédonê ; Acynétos et Syncrasis ; Monogène et Macaria. Voici, d’autre part, ceux du nombre duodénaire : Paraclet et Pistis ; Patricos et Elpis ; Métricos et Agapê ; Aïnus et Synésis ; Ecclésiastique et Marcariote ; Thélétus et Sophia. Je suis forcé d’expliquer ici, par un exemple semblable, ce qui manque à ces noms. Il y eut dans les écoles de Carthage un froid rhéteur latin du nom de Phosphore. Un jour qu’il contrefaisait le brave : Ô mes concitoyens ! dit-il, j’arrive devant vous du champ de bataille, avec ma victoire, avec votre félicité, accru, glorieux, fortuné, très-illustre, triomphateur. Ses disciples aussitôt de s’écrier : Ô famille de Phosphore[1] ! Tu sais maintenant ce que c’est que Fortunata, Hédonê, Acinète, et Thélétus. Écrie-toi aussi : Ô famille de Ptolémée ! Voilà ce Plérôme mystérieux qui se compose de la plénitude d’une divinité répartie entre trente. Nous verrons quels sont les priviléges des nombres quaternaire, octonaire et duodénaire. Remarquons en attendant que cette fécondité tout entière s’arrête au nombre trente ; l’énergie, la faculté et la puissance prolifique des Éons sont épuisées, comme s’il n’y avait pas de nombres au-delà ni d’autres noms qu’un pédagogue pût leur enseigner ! Pourquoi, en effet, ne pas aller jusqu’à cinquante, jusqu’à cent procréations ? Pourquoi oublier

  1. Le sel de cette plaisanterie est dans l’exclamation φεῦ, qui, en grec, exprime également la douleur ou l’admiration.