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même origine l’éternité, puisqu’elle n’a ni commencement ni fin, elle ne comportera ni division ni changement, par la même raison que Dieu n’en comporte pas. Associée à la prérogative de son éternité, il faut nécessairement qu’elle participe avec lui aux forces, aux lois et conditions de l’éternité. De même, quand tu dis : Chaque être a en soi quelque partie de la Matière, afin que le tout se retrouve dans ses parties, tu entends par là les parties de la Matière qui en ont été détachées, et que nos yeux aperçoivent aujourd’hui. Comment donc tous les êtres ont-ils une partie de toutes choses, même des choses anciennes, puisque ceux que nous voyons aujourd’hui possèdent des parties différentes de ceux d’autrefois ? La Matière a subi une transformation meilleure, dis-tu, de mauvaise qu’elle était apparemment ; et aux choses meilleures tu donnes pour type les plus mauvaises.

XL. Tout à l’heure régnait la confusion ; mais voici l’arrangement. Tu veux que de l’ordre naisse le désordre ! Rien n’est la représentation de quoi que ce soit, à moins de lui être égal. Un homme qui se regarde dans le miroir du barbier n’y trouve point l’image d’un mulet, mais celle d’un homme, excepté peut-être celui qui s’imagine qu’à la Matière déjà polie et façonnée répond une Matière grossière et informe. Qu’y a-t-il d’informe aujourd’hui dans le monde, qu’y avait-il autrefois de beau dans la Matière, pour que le monde soit le miroir de la Matière ? Quand les Grecs appellent le monde d’un mot qui signifie ornement, comment reproduit-il l’image d’une Matière sans ornement, pour que tu puisses affirmer que le tout se reconnaît dans ses parties ? Toujours est-il que ce qui n’a pas subi la transformation appartiendra à ce tout. Mais tu as dit tout à l’heure que Dieu ne l’avait pas employée tout entière. Donc cette partie grossière, confuse, étrangère à tout arrangement, ne peut se reconnaître dans des créatures polies, distinctes, ordonnées avec sagesse, et qu’on ne peut appeler des parties de la Matière, puisque, séparées d’