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métempsychose, s’emparent, j’imagine, de l’exemple d’Elie, qui est comme représenté dans Jean, le précurseur du Christ. « Elie est déjà venu, et ils ne l’ont pas connu. » Et ailleurs, « Si vous voulez l’entendre, il est lui-même Elie qui doit venir. » Quoi donc ? Les Juifs interrogeraient-ils Jean, « Etes-vous Elie ? » en vertu du système de Pythagore, et non conformément à la prophétie divine : « Voilà que je vous enverrai Elie le thesbitain ? » Mais leur métempsychose est le rappel de l’âme morte depuis longtemps et revivant dans un autre corps. Elie, au contraire, viendra, non pas après avoir quitté la vie, mais en changeant de lieu simplement ; non pour être rendu à un corps dont il ne s’est pas séparé, mais pour être rendu à un monde hors duquel il a été enlevé ; non pour ressusciter à une vie qu’il avait perdue, mais pour accomplir la prophétie, toujours lui, toujours le même, rapportant son nom et sa substance d’homme.

— Mais comment Jean sera-t-il Elie ?

— Tu as la parole de l’ange. « Et il ira, devant lui, en présence du peuple, dans l’esprit et la vertu d’Elie, » mais non dans son âme, ni dans sa chair. Les substances, en effet, sont la propriété de chaque individu. Mais, de même que l’esprit et la vertu sont conférés par la grâce de Dieu, de même ils peuvent être transportés à un autre par la volonté de Dieu, comme il arriva autrefois de l’esprit de Moïse.

XXXVI. Nous avons abandonné, pour nous jeter dans les questions qui précèdent, un point où il nous faut revenir. Nous avions établi que l’âme est semée dans l’homme et au moyen de l’homme, et qu’il n’y avait dès le commencement qu’une semence pour l’âme, de même que pour la chair, dans toute la postérité humaine, afin de répondre ainsi aux opinions rivales des philosophes et des hérétiques, et surtout à cette tradition surannée de Platon. Maintenant nous poursuivons l’ordre des questions qui viennent après celles-là.