Page:Tertullien - Œuvres complètes, traduction Genoud, 1852, tome 2.djvu/474

Cette page n’a pas encore été corrigée

ceux que vous vous efforcez de perdre, ou que vous n’osez instruire une cause que vous connaissez. Mais votre perversité n’en éclate que mieux, si vous nous forcez de nier des crimes dont vous ne doutez pas.

Laissons de côté les formes judiciaires. Il conviendrait bien plus à votre haine, non pas de nous contraindre à nier, de peur de soustraire à la justice ceux que vous haïssez, mais de nous forcer à confesser chacun de nos crimes, afin que votre ressentiment puisse se rassasier de nos tortures, quand on saura évidemment combien de festins impies a célébrés chacun de nous, combien de fois il a commis l’inceste sous le voile des ténèbres. Que dirai-je encore ? Puisqu’il s’agit d’anéantir notre race, il faudrait étendre l’information à nos associés et à nos complices. Il faudrait traîner devant les tribunaux les égorgeurs d’enfants, les cuisiniers, et les chiens eux-mêmes qui donnent le signal de ces noces. L’affaire serait éclaircie ; il y a plus : les spectacles en deviendraient plus piquants. Avec quel empressement on accourrait au Cirque pour assister aux combats d’un Chrétien qui aurait dévoré une centaine d’enfants ! Puisque l’on nous accuse de monstruosités si révoltantes, il serait bon de les mettre en lumière, de peur qu’elles ne parussent incroyables et que la haine publique ne se refroidît à notre égard ; car la plupart ne croient qu’à demi ces horreurs, répugnant à se persuader que la nature, à laquelle est interdite la chair de l’homme, puisse chercher un aliment digne des bêtes féroces.

III. Vous donc qui vous montrez si scrupuleux investigateurs quand il s’agit de délits bien moindres, mais qui oubliez votre zèle aussitôt que nous sommes accusés d’atrocités qui surpassent la plus révoltante barbarie, soit en refusant de recevoir l’aveu auquel doivent toujours viser les juges, soit en n’instruisant pas la cause, qui est le premier devoir avant de condamner, n’est-il pas manifeste par là que tout notre crime consiste dans le nom que nous portons ? Cela est tellement vrai, que si la vérité de nos crimes