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AUX NATIONS


LIVRE PREMIER

I. Voici un témoignage de votre ignorance, qui, au lieu de servir d’excuse à votre iniquité, ne fait que la démontrer plus clairement : c’est que tous ceux qui autrefois avaient la même haine et la même ignorance que vous, ont cessé de nous haïr, en cessant d’ignorer, aussitôt qu’il leur est arrivé de nous connaître. Que dis-je ? ils sont devenus eux-mêmes ce qu’ils haïssaient, et ils ont commencé de haïr ce qu’ils avaient été. Tant il est vrai que vous gémissez à l’aspect du nombre toujours croissant des Chrétiens. La ville en est assiégée, répétez-vous à grands cris : dans les champs, dans les châteaux, dans les îles, partout des Chrétiens. Vous voyez avec douleur tous les sexes, tous les âges, toutes les conditions venir à nous pour vous laisser dans la solitude. Et cependant cette désertion elle-même ne vous suggère pas la pensée qu’il y a là-dessous quelque merveille cachée. Il ne s’élève en votre âme aucun doute ; vous ne voulez point en faire l’expérience de plus près : la curiosité, naturelle à l’homme, s’arrête là seulement. Vous aimez mieux ignorer parce que vous haïssez déjà, comme si vous saviez bien qu’avec l’examen vous cesseriez de haïr. Il y a plus : si vous n’étiez pas aveuglés par la haine, vous reconnaîtriez qu’il est