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mais tradition. Qu’on ose donc soutenir qu’ils ont erré ceux qui ont transmis la foi !

XXIX. Mais de quelque part que vienne l’erreur, elle a donc régné jusqu’à ce qu’elle ait été détruite par l’hérésie. La vérité attendait donc que les Marcionites et les Valentiniens vinssent la délivrer ! Cependant on prêchait mal, on croyait mal, tant de milliers de milliers d’hommes étaient mal baptisés, tant d’œuvres de foi mal faites, tant de prodiges mal opérés, tant de dons surnaturels mal conférés, tant de sacerdoces et de ministères mal exercés, tant de martyrs enfin mal couronnés ! Et si ce n’était ni mal ni en vain, comment pouvait-il y avoir une religion, un culte de Dieu avant que Dieu fût connu des Chrétiens, avant qu’on eût trouvé le Christ ? Comment l’hérésie existait-elle avant la véritable doctrine, puisqu’en toutes choses la vérité précède l’image, l’ombre suit le corps ? Mais quelle absurdité de prétendre que l’hérésie est antérieure à la véritable doctrine qui nous a annoncé qu’il y aurait des hérésies, et qui nous avertit de les éviter ! C’est à l’Église, dépositaire de cette doctrine, qu’il est dit, ou plutôt c’est cette doctrine même qui dit à l’Église : « Si un ange vient du ciel vous annoncer un autre Evangile que celui que je vous ai annoncé, qu’il soit anathème. »

XXX. Où était alors Marcion, ce pilote du Pont-Euxin, ce stoïcien zélé ? Où était Valentin le platonicien ! Car il est constant qu’ils vivaient, il n’y a pas long-temps, sous Antonin, et qu’ils professèrent la doctrine catholique dans l’Église romaine, sous le pontificat du bienheureux Eleuthère, jusqu’à ce que leur caractère inquiet et leurs opinions, qui séduisaient les fidèles, les fissent chasser de l’Église par deux fois l’un et l’autre, et Marcion même, avec deux cents sesterces qu’il avait apportés. Depuis ce moment, ils répandirent plus que jamais le venin de leurs hérésies. Enfin Marcion ayant abjuré ses erreurs, on consentit à lui donner la paix, sous la condition, qu’il accepta, de ramener à l’Église ceux qu’il lui avait enlevés : mais la mort ne lui