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l’esprit ou à l’âme ? Dans le langage ordinaire, que font les mourants ? rendent-ils l’esprit ou bien l’âme ? Enfin voyez les philosophes et les médecins eux-mêmes. Quoiqu’ils se proposent de disputer aussi sur l’esprit, chacun d’eux écrit au frontispice de son œuvre et en tête de la matière : De l’âme. Veux-tu savoir aussi comment Dieu s’exprime ? C’est toujours à l’âme qu’il adresse la parole, l’âme qu’il interpelle, l’âme qu’il exhorte, pour attirer à lui l’esprit, « C’est elle que le Christ est venu sauver ; elle qu’il menace de perdre dans les enfers ; elle qu’il défend de trop aimer ; elle que le bon Pasteur lui-même donne pour ses brebis. » Tu as la prépondérance de l’âme ; tu as aussi avec elle l’union de la substance, afin d’en conclure que le principe intelligent est un instrument et non un maître.

XIV. L’âme d’ailleurs est une, simple, et formée tout entière d’elle-même ; elle n’est pas plus composée de parties étrangères que divisibles, parce qu’elle ne peut pas se dissoudre. Composée de parties étrangères, elle pourrait se dissoudre et alors elle perdrait l’immortalité. Par conséquent, de ce qu’elle n’est pas mortelle, elle n’est pas divisible et ne peut se dissoudre. En effet, se diviser, c’est se dissoudre ; se dissoudre, c’est mourir. Or elle sera divisée en différentes parties, tantôt en deux par Platon, tantôt en trois par Zenon, tantôt en cinq et en six par Panœtius, tantôt en sept par Soranus, tantôt en huit chez Chrysippe, même jusqu’en dix chez quelques stoïciens, et en plus de deux chez Posidonius, qui, parlant de deux principes, l’hégémonicon ou le dirigeant, le logicon ou le raisonnable, les divise ensuite en douze : c’est ainsi qu’on partage l’âme en différentes parties. Mais elles seront moins des parties de l’âme que des propriétés, des énergies, des œuvres, ainsi qu’Aristote lui-même a jugé de quelques-unes. En effet, ce ne sont pas des organes d’une substance animale, mais des aptitudes, telles que le mouvement, l’action, la pensée et les autres distinctions de même nature, à peu près comme les cinq sens si connus, la vue, l’ouïe, le goût,