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de vous-mêmes à votre conscience. Qu’elle nous juge, qu’elle nous condamne, si elle peut nier que tous vos dieux ont été des hommes. Qu’elle ose le contester, elle sera confondue par les monuments antiques qui vous en ont transmis la connaissance et qui subsistent encore parmi nous, par les villes où ils sont nés, par les pays où ils ont vécu, où ils ont laissé des traces de leur passage, où l’on montre même leurs tombeaux. Je ne passerai pas en revue l’un après l’autre tant et de si puissants dieux, anciens, nouveaux, barbares, grecs, romains, étrangers, captifs, adoptifs, particuliers, communs, mâles, femelles, de la ville, de la campagne, marins, guerriers. Il serait inutile d’examiner leurs litres. Je n’en dirai qu’un mot, moins pour vous les faire connaître que pour vous rappeler ce que vous me paraissez en effet avoir oublié.

Vous n’avez point de dieu avant Saturne. De Saturne viennent vos dieux principaux et les plus connus. Ainsi, ce qui est certain du premier, il faudra l’avouer de toute sa postérité. Interrogeons-nous les historiens ? Ni Diodore de Sicile, ni Cassius Sévérus, ni Thallus, ni Cornélius Népos, ni aucun autre écrivain de l’antiquité, ne parlent de Saturne que comme d’un homme. Si nous consultons les monuments publics, on ne peut en trouver de plus authentiques qu’en Italie, où Saturne, après plusieurs expéditions et à son retour de l’Attique, s’arrêta et fut reçu par Janus, ou Janès, comme le veulent les Saliens. Il donna son nom à la montagne où il s’était retiré, à la ville qu’il fonda ; (elle le conserve encore aujourd’hui ;) à toute l’Italie enfin, qui perdit dès-lors le nom d’OEnotrie. Il fut le premier qui apporta l’écriture à cette contrée, et marqua la monnaie à l’effigie du prince : de là vient qu’il préside au trésor public. Saturne est donc un homme. S’il est homme, il est fils d’un homme, et non pas du ciel et de la terre. Mais comme son origine était inconnue, il fut aisé de lui attribuer pour parents ceux dont nous pouvons tous nous dire les enfants. Qui, en effet, par honneur et par respect