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largesse de Jésus-Christ. Aussitôt voilà mille jugements sur son compte. Viennent-ils des Chrétiens ou des païens ? je l’ignore ; car les païens ne tiendraient pas un autre langage. On en parle comme d’un étourdi, d’un téméraire, d’un désespéré qui cherche la mort et qui, interrogé sur son extérieur, a mis en péril le nom chrétien, comme s’il n’y avait que lui de brave, comme s’il était le seul chrétien parmi tant de compagnons ! Il ne leur reste assurément qu’à répudier le martyre, puisqu’ils ont méconnu les prophéties du même Esprit saint. Eh quoi ! murmurent-ils sourdement, compromettre cette paix si favorable et si prolongée ! Je n’en doute pas, quelques-uns commencent déjà à détourner le sens des Ecritures, à préparer leurs bagages, « et à fuir de cité en cité. » Car de tous les textes de l’Evangile, ils ne se souviennent que de celui-là. Je connais leurs pasteurs, lions pendant la paix, cerfs pendant la guerre. Mais nous traiterons ailleurs les questions qui concernent le martyre. Contentons-nous de répondre aujourd’hui à l’objection qu’ils nous opposent : Où nous est-il défendu de porter une couronne ? Je commencerai plus volontiers par ce point, qui est tout le fonds de la matière présente, afin d’instruire ceux qui veulent par cette question éclairer leur ignorance, ou de convaincre ceux qui s’opiniâtrent à défendre leur faute, m’adressant surtout à ces Chrétiens qui ont été couronnés de laurier, les seuls qui soulèvent cette difficulté, comme si la prévarication mise en discussion était nulle ou tout au moins incertaine. Nulle ou incertaine, je leur prouverai dans un moment qu’elle ne l’est pas.

II. Je soutiens donc qu’aucun fidèle ne porte jamais de couronne sur la tête, excepté pendant le temps de cette épreuve. Tous le pratiquent ainsi, depuis les catéchumènes jusqu’aux confesseurs et aux martyrs, ou même ceux qui ont apostasié. D’où provient l’observance dont il s’agit en ce moment, qu’importe ? Demander pourquoi on observe une chose, c’est constater le fait de son existence. Conséquemment,