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mauvaise par rapport aux Biœothanates[1], pour me servir ici des mêmes termes qu’emploie la magie qui a inventé ces opinions, Hostane, Typhon, Dardanus, Damigéron, Nectabis et Bérénice. Il existe un livre bien connu qui se fait fort de rappeler du séjour des enfers, même les âmes qui se sont endormies à un âge légitime ; même celles qui ont passé par une mort vertueuse ; même celles qui ont reçu incontinent les honneurs de la sépulture. Comment donc appellerons-nous la magie ? Comme l’appellent presque tous : Une imposture.

Mais les Chrétiens sont les seuls qui pénètrent la raison de cette imposture ; nous qui connaissons les puissances spirituelles du mal, non par une secrète complicité avec elles, mais par une science qui les hait ; nous qui, au lieu de les attirer par des opérations invitantes, les traitons avec une fierté qui les subjugue ; science de la magie, fléau multiple de l’intelligence humaine, artisan de toutes les erreurs, ruine non moins fatale au salut qu’à l’âme, seconde idolâtrie, enfin, dans laquelle les démons contrefont les morts, de même que, dans la première, ils contrefont la divinité. En peut-il être autrement, puisque les dieux sont des morts ? Voilà pourquoi on invoque les Ahores et les Biœothanates, d’après cet argument de la foi, que vraisemblablement ces âmes sont les plus puissantes en fait de violences et d’outrages, puisque victimes d’une fin cruelle et prématurée, elles doivent avoir soif de représailles. Mais ce sont les démons qui agissent sous le voile de ces âmes, et les démons surtout qui résidaient en elles pendant qu’elles vivaient, et qui les brisèrent par ces catastrophes violentes. Enfin, nous avons insinué que tout homme, ou à peu près, avait son démon ; et il est connu à la plupart, que les morts prématurées et cruelles, que l’on met sur le compte du hasard, sont l’œuvre des démons.

  1. Biœothanates, ceux qui sont morts violemment. βιὰ, ας, force ; θανὰθος, mort.