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l’éther ; suivant Arius, dans l’air ; suivant les stoïciens, dans la lune. Je m’étonne qu’ils abandonnent sur la terre les âmes des ignorants, puisqu’ils affirment qu’elles sont instruites par des sages bien supérieurs à elles. Où sera la contrée qui servira d’école dans une si grande distance des domiciles ? Comment les disciples se rassembleront-elles auprès de leurs maîtresses, quand elles sont séparées par un intervalle si immense ? D’ailleurs, à quoi servira cette érudition posthume pour des âmes que va détruire la conflagration universelle ? Ils renvoient dans les enfers toutes les autres âmes. Platon, décrivant les enfers dans son Phédon, les représente comme le sein de la terre où les ordures du monde se rendent de toute part, croupissent, exhalent une odeur infecte, et chargent d’un bourbier d’immondices l’air épais et privé de lumière qu’on y respire.

LV. Pour nous, nous ne croyons pas que les enfers soient un souterrain tout nu, ni une sentine recouverte d’un toit dans quelque partie du monde ; c’est une vaste étendue dans l’intérieur de la terre, profonde et cachée jusque dans ses entrailles elles-mêmes. Nous lisons, en effet, que Jésus-Christ passa les trois jours de sa mort dans le cœur de la terre, c’est-à-dire dans sa cavité secrète, intérieure, cachée sous la terre, enfermée dans la terre, et placée sur les abîmes inférieurs eux-mêmes. Que si, tout Dieu qu’il était, le Christ, en sa qualité d’homme néanmoins, mort selon les Ecritures, et enseveli selon les mêmes, se conforma dans les enfers aux lois de la mort humaine ; « que s’il ne monta point au plus haut des deux avant d’être descendu dans les parties les plus basses de la terre, » pour se manifester aux patriarches et aux prophètes, tu as lieu de croire que la région des enfers est placée sous terre, et de heurter du coude ceux qui, avec un peu trop d’orgueil, s’imaginent que les enfers ne sont pas dignes de recevoir les âmes des fidèles, « serviteurs au-dessus du Seigneur, disciples au-dessus du maître, » dédaignant