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pour elle-même de quelque vision ? Faut-il abandonner cette catégorie à une action naturelle, en réservant à l’âme, même en extase, la faculté de reproduire ce qui l’a ébranlée ?

Mais les songes qui paraîtront ne provenir ni de Dieu, ni du démon, ni de l’âme, sans pouvoir être attendus, ni expliqués, ni rapportés, il faut les attribuer proprement à l’extase et à ses propriétés.

XLVIII. On assure que les songes les plus certains et les plus raisonnables sont ceux qui surviennent vers la fin de la nuit, parce qu’alors la vigueur de l’âme se dégage, et que le sommeil se retire. Quant aux saisons de l’année, c’est au printemps qu’ils sont plus paisibles ; la raison en est que l’été relâche les âmes ; l’hiver les endurcit en quelque façon ; l’automne, qui d’ailleurs met en péril la santé, les amollit par le suc de ses fruits. Il en est de même de la position du corps pendant le sommeil. Il ne faut dormir ni sur le dos, ni sur le côté droit, ni l’intérieur du corps renversé, parce que le lieu des sens est troublé quand les cavités de la poitrine sont dérangées, et que la compression du foie met l’esprit à la gêne. Mais ce sont là, j’imagine, d’ingénieuses conjectures plutôt que des preuves certaines, quoique Platon en soit l’auteur. Peut-être même ces circonstances proviennent-elles du hasard. Autrement, les songes arriveront à volonté, si on peut les diriger. Car il s’agit d’examiner en ce moment les règles que l’opinion d’une part, la superstition de l’autre, prescrivent pour les songes au sujet des aliments qu’il faut prendre ou éviter. Il y a superstition, lorsque le jeûne est ordonné à ceux qui doivent consulter l’oracle, afin que l’abstinence amène la pureté : il y a simple opinion, lorsque les disciples de Pythagore rejettent la fève pour le même but, parce que c’est un aliment lourd et indigeste. Mais les trois frères, compagnons de Daniel, qui se contentèrent de légumes pour ne pas se souiller par les viandes, placées sur la table du roi, méritèrent