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ont d’autre but en secourant que de détourner l’esprit de la recherche du Dieu véritable, en lui insinuant un dieu mensonger ? Conséquemment leur puissance n’est ni contenue ni circonscrite dans les murailles d’un sanctuaire. Elle se répand au-dehors, circule çà et là, et par intervalles elle est libre, afin que personne ne doute que les maisons elles-mêmes sont aux démons, et qu’ils assiègent les hommes de leurs illusions, non-seulement dans les temples, mais jusque dans les lieux les plus secrets.

XLVII. Nous déclarons donc que les songes nous sont envoyés la plupart du temps par les démons, quoique vrais et secourables parfois, mais toujours avec le but que nous avons signalé, le mensonge et la fourberie ; à plus forte raison quand ils sont vains, trompeurs et obscurs, pleins d’illusions et impudiques. Faut-il nous étonner que les images appartiennent aux mêmes maîtres que les choses ? Mais au Dieu qui a promis « que son esprit se répandrait sur toute chair, et que ses serviteurs et ses servantes prophétiseraient et auraient des visions, » il faut attribuer les songes qui seront conformes à sa grâce, tous ceux qui sont honnêtes, vertueux, prophétiques, révélateurs, édifiants, sous forme d’appel, dont la largesse a coutume de couler jusque sur les profanes, parce que « Dieu distribue également aux justes et aux injustes ses rosées et ses soleils. » En effet, Nabuchodonosor n’a-t-il pas un songe qui lui est envoyé par Dieu ? La plupart des hommes n’apprennent-ils pas à connaître Dieu par des visions ? Ainsi, de même que la miséricorde de Dieu se répand sur les païens, de même, les saints sont exposés à la tentation de l’esprit mauvais qui ne les quitte jamais, profitant de leur sommeil pour se glisser en eux, s’il ne peut y parvenir pendant qu’ils veillent.

La troisième espèce de songes se composera de ceux que l’âme semble se créer à elle-même par le souvenir de ce qui l’a frappée. Or, puisque l’âme ne peut rêver à son gré, car ainsi le pense Epicharme, comment sera-t-elle cause