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pas follement dépensé le trésor qu’il avait reçu ! Lui seul eût désobéi à une loi qu’il n’aurait pas voulu suivre. Mais il n’appartenait point au législateur de frustrer lui-même sa loi en ne permettant pas l’accomplissement du précepte. »

Voilà quel langage tu tiendrais avec raison contre le Créateur, si en vertu de sa providence et du pouvoir que tu réclames de lui, il s’était opposé au libre arbitre de l’homme. Eh bien ! puisque le Créateur s’est conformé à des institutions empreintes de bonté et de sagesse dans leur origine, hâte-toi de rendre intérieurement hommage à sa gravité, à sa patience, à sa fidélité.

VIII. En effet, il n’avait pas tiré l’homme du néant uniquement pour qu’il eût à vivre de la vie matérielle, mais encore de la vie de la justice, conformément à Dieu et à sa loi. La vie animale, il la lui avait communiquée lui-même, en lui soufflant, selon le langage sacré, « une ame vivante. » Quant à la vie dans le bien, il la lui avait recommandée en l’avertissant de respecter la loi. Celui-là prouve donc que l’homme n’a pas été créé pour la mort, qui désire aujourd’hui le rétablir dans la vie, « aimant mieux le repentir du pécheur que sa mort. » Par conséquent, de même que Dieu avait voulu pour l’homme un état de vie, de même l’homme se précipita dans un état de mort, et cela non point par infirmité, non point par ignorance, en sorte que rien ne peut être imputé au Créateur. Quoique le séducteur fût un ange, celui qui a été séduit était libre et maître de lui-même ; il était « l’image et la ressemblance du Très-Haut, » plus fort que l’ange ; souffle émané de Dieu, il était de plus noble origine que l’esprit matériel, dont se composait la substance angélique. « Les esprits sont tes messagers, s’écrie le Psalmiste, et la flamme est ton ministre. » Dieu aurait-il soumis l’universalité des êtres à l’empire de l’homme, si l’homme eût été incapable de domination ; s’il n’eût possédé une nature « plus relevée que celle des anges, »