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cours de ses blasphèmes et les détruire ? Eh bien ! arrivons à la personne même de son Dieu, ou plutôt de cette ombre, de ce fantôme de christ, et examinons-le par l’endroit même où on lui donne la prééminence sur le Créateur. Là aussi se reconnaîtra la bonté divine à des règles invariables. Mais cette boulé, il faut préalablement que je la trouve, que ma main la saisisse, afin qu’elle me serve comme d’introduction à ces règles.

En effet, j’ai beau remonter la chaîne des temps, depuis que les causes et les éléments avec lesquels ce dieu aurait dû coexister, parurent, dans le monde, nulle part je ne l’aperçois agissant comme il aurait dû agir. Déjà triomphaient et la mort, et le péché, aiguillon de la mort, et la malice du Créateur contre laquelle le Dieu bienfaisant avait à lutter. Docile à la première loi de la bonté divine, ne devait----il pas manifester qu’elle était, chez lui inhérente à sa nature, et combattre le mal aussitôt, que le mal demandait un remède ? Dans un dieu, les qualités sont essentiellement inhérentes à sa nature, innées, coéternelles. Niez-le : des attributs divins, vous faites des attributs contingents, étrangers, par conséquent temporaires, sans éternité. A ce titre donc, j’ai droit d’exiger de Dieu une bonté éternelle, indéfectible, qui, déposée dans les trésors de son être et toujours prête à agir, devance les causes et les éléments de son action. Il ne suffit pas de les devancer : je veux que, loin de les prendre en dédain, ou de leur faire défaut, elle les embrasse avec ardeur. En second lieu, de même que je demandais il n’y a qu’un moment : Pourquoi ne s’est-il pas révélé dès l’origine des choses ? je demanderai encore ici : Pourquoi sa bonté ne s’est-elle pas déployée dès le principe ? Quel obstacle s’y opposait ? N’avait-il pas à se révéler par sa bienveillance, s’il existait réellement ? Etre impuissant sur quelque point ! supposition absurde quand il s’agit d’un Dieu, à plus forte raison manquer aux lois de sa nature : si le libre développement de ses facultés est comprimé, elles cessent d’