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établie entre eux naît la présomption que les paroles suivantes s’appliquent à la chair : « Ce n’est pas le corps spirituel qui a été formé le premier ; c’est le corps animal, et ensuite le spirituel. » De là il résulte encore que c’est elle qu’il faut entendre précédemment par cette chair « qui est semée corps animal et ressuscite corps spirituel, puisque ce n’est pas le corps spirituel qui a été formé le premier, mais le corps animal ; puisque le premier Adam a reçu l’âme, le second Adam l’esprit. » En un mot, tout ce qui est de l’homme est de la chair, en tant qu’il est homme.

Quoi donc ! dirons-nous. La chair n’obtient-elle pas même ici-bas l’esprit par la foi ? N’a-t-on pas droit de demander comment on peut nommer animal ce corps que l’on sème ? Sans doute la chair a reçu l’esprit dès ce monde, mais comme gage seulement ; au contraire, elle a reçu non pas le gage, mais la plénitude de l’âme. Aussi a-t-elle été nommée corps animal du nom de la substance la plus noble, dans laquelle elle est semée, pour devenir un jour corps spirituel par la plénitude de l’esprit, dans laquelle elle ressuscite. M’étonnerai-je qu’elle emprunte son nom à ce qui la remplit tout entière plutôt qu’à ce qui la pénètre à peine ?

LIV. Des mots isolés soulèvent souvent des questions de même que des associations de mots. Parce qu’il est écrit dans l’Apôtre : « Afin que ce qu’il y a de mortel, » c’est-à-dire la chair, soit dévore par la vie, nos adversaires prennent ce mot pour l’anéantissement de la chair, comme si l’on ne disait pas dévorer sa colère, dévorer son ressentiment, c’est-à-dire le cacher, l’ensevelir et le contenir au fond de nous-mêmes. D’ailleurs les paroles suivantes : « Il faut que ce corps mortel soit revêtu d’immortalité, » prouvent assez comment ce qu’il y a de mortel est dévoré par la vie, en s’enveloppant d’un vêtement d’immortalité qui le le recouvre et le contient, mais non en se consumant dans une destruction complète.