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au plus grand nombre. Il n’en va pas de même du Créateur. Les lumières naturelles proclament son existence. Il s’atteste par ses œuvres, qui servent encore à le manifester davantage. A ce Dieu donc qu’il n’est pas permis d’ignorer, d’imposer des châtiments à ceux qui l’ignorent ! Ces mots : « A la présence du Seigneur et devant l’éclat de sa puissance, » qui sont la répétition des paroles d’Isaïe, respirent « le même Dieu qui se lèvera dans l’éclat de sa majesté pour briser la terre. »

Mais quel est « l’homme de péché, l’enfant de perdition qui doit paraître avant l’avènement, du Seigneur, se levant au-dessus de tout ce qui est appelé Dieu ou qui est adoré, et destiné à établir son trône dans le temple de Dieu, s’y montrant avec orgueil comme un dieu ? » Selon nous, c’est l’Antéchrist, comme l’enseignent les prophéties anciennes et nouvelles, et Jean entre autres, dans ce passage : « Plusieurs antechrists ont déjà envahi le monde : ce sont les esprits précurseurs de l’Antéchrist qui nient que Jésus-Christ soit venu dans une chair véritable, et qui divisent le Seigneur, » dans Dieu le Créateur. Selon Marcion, au contraire, je n’oserais pas répondre que ce ne fût le Christ du Créateur ; car il n’est pas encore descendu ici-bas pour lui. Mais que ce soit l’un ou l’autre, pourquoi, lui demanderai-je, celle puissance « dont il est investi ? pourquoi des miracles et des prodiges menteurs ? —Parce que, me répondit-il, ils n’ont pas aimé et reçu la vérité, afin d’être sauvés. C’est pourquoi il y aura en eux un attrait vers l’imposture, afin qu’ils soient jugés, eux qui n’ont pas cru à la vérité et qui ont consenti à l’iniquité. »

Si donc c’est l’Antéchrist, comme nous le comprenons, il sera Dieu, oui, il sera Dieu le Créateur qui l’envoie pour enlacer dans les filets de l’erreur ceux qui n’ont pas cru à la vérité afin d’être sauvés. Le salut et la vérité appartiennent donc au même Dieu qui se venge en précipitant l’homme dans le mensonge, c’est-à-dire qu’ils appartiennent