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se confirma dans le titre de Fils du Créateur.

— Mais Jésus réprimanda le démon.

— Oui sans doute, à cause de sa jalousie, de la témérité de son aveu ou de sa basse adulation, comme si le triomphe de Jésus-Christ était d’être venu pour la ruine des démons et non pour le salut des hommes, lui qui ne permettait pas à ses disciples de se glorifier de leur victoire sur l’esprit, mais seulement de la robe blanche du salut. Ou bien, pourquoi la réprimande ? L’esprit impur avait-il menti tout-à-fait ? alors plus de Jésus, plus de saint de Dieu ! N’avait-il menti qu’à demi en l’appelant Jésus, et le saint de Dieu, mais du Dieu Créateur ? alors il a été injustement repris d’avoir eu une pensée qu’il devait avoir, et de n’avoir pas eu celle qu’il ne pouvait avoir, c’est-à-dire l’idée d’un autre Jésus, le saint d’un autre Dieu.

Si la réprimande n’admet pas d’explication plus vraisemblable que la nôtre, dès-lors le démon n’a pas menti, puisqu’il ne fut pas repris pour un mensonge ; car le Christ était bien ce Jésus hors duquel l’esprit des ténèbres n’en pouvait connaître d’autre ; le Christ lui-même confirma sa déposition en lui reprochant tout autre chose que l’imposture.

VIII. Le Christ du Créateur devait s’appeler Nazaréen, selon la prophétie, De là vient que les Juifs désignent les Chrétiens par le nom de Nazaréens. Nous le sommes en effet. C’est de nous qu’il a été dit, ; « Les Nazaréens ont été rendus plus blancs que la neige. » quoique, autrefois, ils fussent couverts des souillures de la prévarication et enveloppés des ténèbres de l’ignorance. Nazaréen ! ce surnom convenait à mon Christ à cause du refuge que son enfance alla chercher dans Nazareth, lorsqu’il y descendit pour échapper à Archélaûs, fils d’Hérode. Je n’ai point omis cette circonstance, parce que le christ de Marcion aurait dû s’interdire tout commerce avec les lieux familiers à l’envoyé du Créateur. N’avait-il pas à sa disposition je ne sais combien de villes de Judée, que le prophète n’avait pas assignées