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arbre bon ne peut produire de mauvais fruits, et que votre Dieu cependant a prononcé le mot de malice, ce qui répugne à la bonté infinie, n’y a-t-il pas là quelque interprétation plausible qui accorde la bonté avec la malice elle-même ? »

— Sans doute elle existe. La malice, dans ce passage, loin de s’appliquer à la nature du Créateur, en tant que mauvaise, se rapporte à cette même puissance de juge, en vertu de laquelle il disait tout à l’heure : « C’est moi qui crée le mal, » et, « Voilà que je vais répandre sur vous toute espèce de maux. » Mais quels maux ? Les peines du péché, et non le péché lui-même. Nous les avons suffisamment justifiées en démontrant qu’elles sont honorables pour le juge. De même que sous leur appellation générique de mal elles ne sont point répréhensibles dans le juge, et à ce titre seul ne prouvent point sa cruauté ; de même, il faut encore entendre ici par malice les châtiments que le souverain juge inflige eu vertu de ses fonctions judiciaires, et qui sont conformes à la bonté. Chez les Grecs, ce mot est souvent le synonyme de supplice et d’afflictions, comme dans cet exemple. Par conséquent, en se repentant de sa malice, le Créateur no se repentit que de la réprobation prononcée contre la créature dont il se préparait à venger les crimes. Que devient donc le blâme contre le Créateur ? N’y avait-il pas dignité et convenance à décréter la destruction d’une cité couverte d’iniquités ? Concluons : le décret d’extermination, juste en lui-même, c’était la justice et non la malignité qui l’avait porté. Mais le châtiment qui allait fondre sur les coupables, il le nomma malice, comme s’il eût dit douleur et salaire du péché.

— « Eh bien ! couvrez tant qu’il vous plaira du nom de justice la malice du Créateur, puisque la destruction de Ninive était un acte de justice. Alors il n’en est pas moins à blâmer. Il s’est repenti de la justice qui doit demeurer immuable. » — Illusion, répondrai-je ! Dieu ne se