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s’y fit jour. Un ouvrier horloger de Dijon, M. Prost, demanda qu’on en finît avec les politiciens ambitieux qui se servaient du peuple pour arriver, et qu’on adoptât le principe des candidatures ouvrières. La candidature ouvrière est un moyen de bataille primitif, rudimentaire. Il n’est pas étonnant que les ouvriers, réunis pour la première fois en congrès entre eux, sans aucune direction socialiste, y aient pensé[1].

La proposition Prost concernant la candidature ouvrière fut votée à l’unanimité. Ce fut là, nous y insistons, la seule manifestation de l’instinct de classe au Congrès ouvrier de 1876. La sagesse de ces prolétaires leur valut

  1. Il est remarquable que les ouvriers, toujours prompts à proclamer la nécessité des candidatures ouvrières, montrent une grande répugnance à voter pour les candidats ouvriers. La psychologie explique cette répugnance : les ouvriers ne veulent pas, par leurs suffrages, élever au-dessus d’eux un de leurs égaux. Dans l’histoire de Rome, on voit que lorsque le tribunal fut rendu accessible aux plébéiens, pendant longues années, tous les tribuns élus furent des patriciens. La plèbe ne voulait pas porter les siens à cette haute charge. Le prolétariat français a contre les siens les mêmes scrupules ou la même méfiance que la populace romaine.