bourgeoisie était accompagnée d’un progrès politique correspondant.
État opprimé par le despotisme féodal, association armée se gouvernant elle-même dans la Commune ; ici république municipale, là tiers état taxable de la monarchie ; puis, durant la période manufacturière, contrepoids de la noblesse dans les monarchies limitées ou absolues ; base principale des grandes monarchies, la bourgeoisie, depuis l’établissement de la grande industrie et du marché mondial, s’est enfin emparée du pouvoir politique, à l’exclusion des autres classes, dans l’État représentatif moderne. Le gouvernement moderne n’est qu’un comité administratif des affaires de la classe bourgeoise.
La bourgeoisie a joué dans l’histoire un rôle essentiellement révolutionnaire.
Partout où elle a conquis le pouvoir, elle a foulé aux pieds les relations féodales, patriarcales et idylliques. Tous les liens multicolores qui unissaient l’homme féodal à ses supérieurs naturels, elle les a brisés sans pitié, pour ne laisser subsister entre l’homme et l’homme d’autre lien que le froid intérêt, que le dur argent comptant. Elle a noyé l’extase religieuse, l’enthousiasme chevaleresque, la sentimentalité du petit bourgeois, dans les eaux glacées du calcul égoïste. Elle a fait de la dignité personnelle une simple valeur d’échange ; elle a substitué aux nombreuses libertés si chèrement conquises, l’unique et impitoyable liberté du commerce. En un mot, à la place de l’exploitation voilée par des illusions religieuses et politiques, elle a mis une exploitation ouverte, directe, brutale et éhontée.
La bourgeoisie a dépouillé de leur auréole toutes les