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chéri ! Enfin, le bouquet fini et renfermé dans le sac, nous descendons, quittant la lumière d’en haut et nous hâtant vers les gorges où la nuit tombe. Plaisant retour, gais propos, soirée radieuse, fleurs de la montagne, joie paternelle et joie de l’enfant, hélas !…

 
Toutes ces choses sont passées
Comme l’ombre et comme le vent !


Marcel Bertrand s’était marié tard. Au mois d’octobre de 1886, âgé déjà de trente-neuf ans, il avait épousé Mlle Mathilde Mascart, l’une des filles du célèbre physicien, membre de l’Académie des Sciences. Rarement union fut plus heureuse : de part et d’autre, l’intelligence la plus largement ouverte et la plus cultivée ; ici, la science audacieuse et profonde, et, avec la science, le goût inné de la beauté littéraire ; là, un admirable talent de pianiste et la passion de l’art ; sur tout cela, l’amour de la vie simple, le mépris de la richesse et le dédain du monde ; et, pour compléter l’entente et la fusion de ces deux âmes exceptionnelles, les mêmes idées générales et la plus vive inclination réciproque. On ne pouvait s’asseoir à ce foyer privilégié sans avoir l’impression du bonheur, de ce bonheur qui consiste dans la paix, qui survit aux chagrins inévitables, et qui est plus fort que la mort elle-même, comme l’amour, d’où il procède.

Les chagrins vinrent vite, ainsi qu’ils ont coutume. Des sept filles, fruits de cette union, qui reçurent les noms de Jeanne, Fanny, Claire, Hélène, Thérèse, Marcelle et Louise, deux moururent en bas âge : Hélène en octobre 1893, à dix mois ; Marcelle à dix-huit mois, en septembre 1899. L’année 1899 s’acheva dans la tristesse et dans l’inquiétude : tristesse de ce dernier deuil, si récent ; inquiétude au sujet du grand-père, Joseph Bertrand, qui avait longtemps défié la vieillesse et dont