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dans la coupe de quelque philtre de satyre.

La scène changea ; au lieu de l’Espagne, je vis une terre stérile, les sables ensoleillés de l’Égypte, arrosés par le Nil léthargique, où Hadrien se tenait, gémissant, délaissé, inconsolable d’avoir perdu pour toujours le garçon qu’il aimait tant. Envoûté par cette douce musique, qui aiguisait tous les sens, je commençais à comprendre des choses jusque-là si étranges, l’amour que le puissant monarque éprouvait pour son bel esclave grec, Antinoüs, qui, comme le Christ, était mort pour son maître. Mon sang se mit alors à affluer de mon cœur vers ma tête, puis il descendit dans toutes mes veines, comme des vagues de plomb en fusion.

La scène changea alors pour montrer les splendides villes de Sodome et Gomorrhe, étranges, belles et grandioses ; les notes du pianiste semblaient alors me murmurer à l’oreille le halètement d’une convoitise avide, le son de baisers excitants.

Puis, au beau milieu de ma vision, le pianiste tourna la tête et me jeta un long regard languissant, et nos regards se croisèrent à nouveau. Mais était-ce le pianiste, était-ce Antinoüs, ou plutôt n’était-ce pas l’un de ces deux