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une forme allégorique. On retrouvera dans la pièce suivante la douleur du poète.


L’ABANDONNÉE


Une femme resplendissante de beauté,
Issue d’une noble origine,
S’est retirée dans la solitude d’une montagne
Où elle vit, abandonnée, au milieu des herbes,
Ses seules compagnes.
Un jour, disait-elle, une révolution
Éclata aux frontières de l’empire,
Mes frères ont été tués !
Hélas ! à quoi sert-il d’être élevé aux honneurs !
On n’a même pas pu recueillir leurs ossements.
Toute chose a une fin ! Les exploits d’un héros sont semblables
A l’éclat d’une flamme
Qu’un souffle peut éteindre.
Mon mari, l’infidèle ! m’a abandonnée.
Et sa nouvelle femme est jolie comme le jade.
Il n’a de regards que pour le sourire de cette femme,
Il est insensible à mes soupirs !
Ainsi le limpide cristal d’une source
Sort obscurci des flancs de la montagne.
La servante a vendu mes perles
Et revient couvrir de paille
Le toit de ma chaumière...
Je cueille des fleurs, mais je n’en parerai pas
Mes sombres cheveux.
Moi-même de mes deux mains
Je ramasse le bois mort,
Et pour résister au froid,
Je n’ai que mes manches transparentes ;