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Ne vous est-il jamais arrivé, lecteur, de recevoir un pavé sur la tête ?

Si oui, vous comprendrez facilement la stupéfaction profonde qui s’est emparée de moi mercredi, lorsque j’ai lu dans les journaux du matin l’arrêté de l’état de siège me concernant.

« Comment ! me suis-je écrié — avec tant de force que mon gérant en est devenu sourd, — comment ! si les articles incriminés de la Jeune Republique sont à ce point subversifs, pourquoi ne s’en aperçoit-on que quatre jours après leur apparition ? »

De deux choses l’une : ou l’autorité les avait lus depuis le samedi matin ; ou elle n’en a eu connaissance que par les ravages terribles qu’ils ont causés.

Dans le premier cas, le général n’a pas trouvé d’abord ces articles dangereux, et alors, n’étant pas du tout connaisseur en cette matière, il ferait mieux de laisser la surveillance de la presse à ce cher M. Limbourg qui s’y entend fort, comme on sait.

Dans le second cas, notre grand chef militaire s’est montré bien peu soucieux de la vie des citoyens commis à sa garde, puisqu’il a préféré se promener au Prado qu’empêcher dès le début notre numéro 85 de lancer sur les Marseillais des articles aussi explosibles.