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Le comité révolutionnaire, présidé par Gaston Crémieux, décida donc qu’il y avait lieu d’organiser une grande manifestation en faveur de la paix.

Elle eut lieu dans les premiers jours d’août.

On réussit à former un groupe assez nombreux, et, drapeau en tête, nous parcourûmes les principales rues de la ville.

Comme les manifestants heurtaient le sentiment public, la démonstration ne se fit pas sans incidents ; on nous siffla quelque peu, des coups furent échangés ; le porteur du drapeau, un cordonnier, se comporta comme un héros des temps antiques, défendant avec courage son étendard contre la multitude qui voulait le lui arracher et qui nous criait : « À bas les Prussiens ! » À la place de la mairie, la bagarre devint sérieuse ; la gendarmerie chargea contre nous ; des arrestations furent opérées.

Quand la manifestation fut dispersée, je m’en retournai tristement chez moi, réfléchissant avec amertume sur les inconséquences de la foule. Le peuple, à Marseille, étant républicain, je ne pouvais comprendre qu’il approuvât une guerre dont l’Empire semblait devoir bénéficier.