Page:Taxil - Confessions d'un ex-libre-penseur - 1887 - Letouzey et Ané - 6e édition.djvu/55

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

En 1882, au mois de juin, je m’étais rendu en Italie, à l’occasion des funérailles de Garibaldi. À Rome, l’Association Démocratique des étudiants de l’Université m’invita à donner une conférence à la jeunesse des écoles. M. le sénateur Caracciolo de Bella mit à ma disposition la salle de la Société Progressiste. Là, en face du Vatican, le cœur gonflé d’une haine satanique, je me répandis, avec une fureur sans égale, en invectives contre la religion et la papauté.

Ce même jour, 10 juin, une autre voix s’élevait dans la chaire d’une église de Rome, et cette voix disait :

— Prions, mes frères, prions pour un aveugle ; prions pour un de mes anciens élèves que l’enfer nous a pris et qu’il nous faut arracher à l’enfer.

Et le prédicateur sans me nommer, racontait l’histoire des vingt-cinq francs de la Petite Œuvre. En narrant cette anecdote, il avait des larmes dans la voix. Et les prières des fidèles montèrent suppliantes vers le ciel.

Ce prédicateur, c’était l’ancien missionnaire d’Issoudun, mon professeur de Saint-Louis. Il avait réalisé son beau rêve d’apôtre. Il ne s’appelait plus l’abbé, mais le Père Jouet.