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cloîtres… La force est tout, le droit n’a même pas de nom ; on se trouve au milieu d'un chaos de mœurs, de lois et de traditions restées debout après la chute de l’Empire romain… Il n’y a pas même lutte entre les faibles et les forts ; il y a écrasement de ceux-là par ceux-ci. Ce ne sont qu’illégalités violentes et illégitimes entre maîtres et esclaves, vainqueurs et vaincus, seigneurs et serfs, nobles et vilains ; c’est le droit fictif et précaire de la lutte brutale, intéressée et aveugle, et ce droit, qui n’est autre que l’injustice, va subsister jusqu’à l’apparition du droit vrai, du droit éternel et imprescriptible de l’intelligence qui éclaire et de la raison qui émancipe !…

C’est alors que surgit, du sein même des oppresseurs, une institution qui vient protester contre cet écrasement du faible par le fort, et qui, sans en avoir conscience, ouvre la voie à la grande revendication des classes opprimées, lesquelles, mille ans plus tard, arriveront à la plénitude de leurs droits.

Cette institution, Vénérables Maîtres, vous avez dû le deviner, c’est la Chevalerie.

Née au milieu de l’anarchie et de la tyrannie du régime féodal, elle a soutenu le monde moral qui semblait prêt à s’écrouler. Elle a consacré le culte des affections généreuses, des sentiments magnanimes ; elle a érigé en dogme quelques-uns de ces principes qui relèvent l’espèce humaine courbée sous le joug de l’ignorance et de la barbarie : celui de la défense du faible ; celui qui adoucit le plus promptement les mœurs, l’amour respectueux des femmes ; la générosité, qui ne connaît plus d’ennemi quand il est désarmé ou à terre ; enfin, cette maxime qui, sous une forme simple, énergique et concise, résume toute la théorie et toute la pratique de la morale : « Fais ce que dois, advienne que pourra ! »