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m’attaquêrent vivement à leur tour. Je leur rendis la monnaie de leur pièce.

Après cet échange fraternel d’invectives, je me retirai, ainsi que les Frères étrangers à la Loge, et les trente assistants réguliers entrèrent en délibération. Mon exclusion était demandée ; dix voix la refusèrent, et vingt l’accordèrent. C’était peu, la Loge comptant cent douze membres ; mais le Grand-Orient n’en demandait pas davantage[1].

  1. Autres irrégularités commises en violation formelle de la Constitution maçonnique :
    Le Vénérable, lors de la délibération, ne fit pas sortir les F∴ qui avaient signé la plainte contre moi. L’art. 18 des Dispositions Judiciaires est cependant très précis : « Les membres qui ont signé la plainte, dit-il, sont prévenus qu’ils ne peuvent prendre part au jugement qui va être rendu et couvrent le Temple ». Cette expression couvrir le Temple veut dire : sortir de la salle où se tient la séance. Tous mes ennemis déclarés ont participé à la délibération et ont voté.
    En outre, le vieux monsieur, qui prononça le réquisitoire, et que le Vénérable, en lui donnant la parole, appela le « Rapporteur de l’affaire », ne faisait pas partie du Comité Secret d’Enquête ; et ce n’était pas ce Comité Spécial qui l’avait nommé, puisque ledit Comité avait conclu qu’il n’y avait pas lieu de donner suite à la plainte. Or, les termes de l’art. 15 (voir plus haut) sont encore formels : c’est le Comité d’Enquête qui seul a pouvoir de nommer son Rapporteur et de dresser l’Acte d’accusation. Mais voilà : ayant violé l’art. 14 en ne prononçant pas l’annulation de la plainte conformément aux conclusions du Comité, le Vénérable était forcément entraîné à violer l’art. 15.
    Mon exclusion n’a donc jamais eté valable ; car l’art. 8 dit expressément : « Les peines maçonniques ne peuvent être appliquées que par un jugement rendu suivant les formes prescrites par les présents statuts. »
    Toutes mes observations n’ont pas pour but de réclamer contre les irrégularités maçonniques que je signale ; on pense bien qu’à cette heure surtout je m’en soucie très peu. Mais de nombreux maçons, tant de ma Loge que des autres Loges, connaissaient ces irrégularités dans tous leurs détails, et jamais aucun d’entre eux n’a eu le courage de demander la mise en jugement du Vénérable qui avait à ce point violé les statuts ; beaucoup me plaignaient, mais la peur d’avoir mon sort à leur tour les a toujours retenus.