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vis imprimé ce quiproquo, dont les palladistes parisiens durent être renversés, mais qu’ils ne purent démentir ; car comment démentir, sans donner leurs noms, sans avouer le grave fait du 25 mars et ses conséquences ?…

Si je n’avais pas à cœur de faire connaître la vérité, je laisserais croire à cet épisode et en tirerais vanité. Avant ma conversion, il était malaisé de rectifier ; cela m’eut entraînée à des explications sur des faits que je considérais comme devant être tenus secrets. Aussi, en ce qui concerne ce temps, je me bornai à rectifier des dates, dans la lettre que j’écrivis au docteur Bataille et qu’il publia ; mais j’eus soin d’y faire des réserves. Aujourd’hui, je puis parler.

D’ailleurs, si j’ai des rectifications à apporter, j’aurai lieu de confirmer, d’autre part, de nombreux faits, et non des moins importants.

Quant aux ignorants du surnaturel diabolique, qui ont critiqué parce que les tours du « grappin » paraissent invraisemblables en raison de leur caractère burlesque poussé à l’outrance, leur opinion sceptique fait sourire de pitié les théologiens érudits, les hommes qui à une foi solide joignent une connaissance approfondie de cette grave question du merveilleux.

Rien n’est moins extraordinaire que ce fait de la tête du grand-maître B. retournée à l’envers par un démon. Un de mes abonnés a bien voulu me signaler un cas semblable, dont les deux Eugène de l’Univers peuvent rire entre eux, mais qui n’en est pas moins un fait absolument authentique.

Dans la Vie du Père Jérôme d’Estienne, religieux éminent par ses vertus et sa piété, de l’ordre des Minimes, ayant vécu en Provence au xviie siècle, — ouvrage écrit par le R. P. Pierre de Rians, du même ordre, et imprimé à Aix avec l’approbation du P. général, du P. provincial et de trois théologiens de l’ordre (Aix, imprimeur Beau-Audibert, 1714-1715), — on lit, en effet, l’épisode suivant : « En 1697, le P. Toussaint Pasturel était local à Tretz. Il y fut témoin du fait de persécution diabolique au P. Jérôme d’Estienne, qu’il raconte ainsi : en cette année 1697, le P. d’Estienne fut envoyé au couvent de Tretz pour le gouverner en qualité de supérieur. Dès qu’il y fut arrivé, il alla à l’église rendre ses hommages à N.-S. Jésus-Christ ; c’était là sa coutume ; car, disait-il, lorsque l’on entre dans une maison, on doit aller d’abord en saluer le maître. Après quoi, il monta à la chambre qu’on lui avait préparée et demanda qu’on lui apportât de l’eau bénite. J’allai dans l’instant lui remplir un bénitier. Le P. d’Estienne en voulut une plus grande quantité. Laquelle lui ayant été apportée, il y trempa ses deux mains et les appliqua sur son visage. Le démon, ne pouvant souffrir cette pieuse pratique, le lui tourna tellement que ses yeux, sa bouche, le nez et tout le devant du visage parurent sur le derrière de la tête. Jamais homme, me dit le P. Pasturel, ne fut plus effrayé que moi, lorsque le vis ce terrible spectacle. »