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calomnies. Par une autre voie, je reçus l’avis apporté à l’un de mes amis : j’étais autorisée à prendre tout mon temps pour tenir certain engagement, qui n’a pas à être divulgué, et l’on reconnaissait que je ne devais rien faire qui pût compromettre ma sécurité.

Ma résolution fut bientôt prise : faire triompher la vérité par l’écroulement successif des mensonges.

Les mensonges mis en circulation n’étaient pas nombreux alors ; leur compte pouvait être réglé assez rapidement. Mon plan consistait à détruire l’une après l’autre chaque invention imaginée pour nuire à mon œuvre et à montrer à quel mobile avait obéi l’inventeur de chaque mensonge.

Après l’incident Margiotta, un répit me paraissait nécessaire, et d’ailleurs je portai toute mon attention sur le grand événement qui allait s’accomplir à Trente.

Cependant, j’eus des échos du premier tumulte soulevé en Allemagne par la brochure du F ▽ Findel.

Des journaux catholiques allemands s’étaient laissé troubler, avaient admis comme sincères, véridiques, les dénégations de ce vieil ennemi de l’Église.

En parcourant cette brochure, on se demande si l’hésitation était possible ! On se le demande, quand on sait ; puis, en constatant que ce trouble des esprits s’est vraiment produit, on déplore que l’ignorance de la plupart des bons journalistes soit si complète en matière maçonnique. Car elle méritait tout simplement d’être repoussée du pied, cette brochure où la stupéfiante effronterie de Findel a osé écrire que ni Cavour ni Mazzini ne furent jamais francs-maçons et qu’Albert Pike était un simple grand-maître du Rite Écossais, l’égal de tous les autres grands-maîtres, le Suprême Conseil de Charleston étant supérieur à aucun autre !

Oui, voilà ce que le palladiste Findel a eu le « toupet » d’écrire en toutes lettres, d’imprimer, et des journalistes catholiques se sont inclinés. « Meâ culpâ, pour avoir cru jusqu’à présent au maçonnisme de Cavour et de Mazzini ! Meâ maximâ culpâ, pour avoir cru à la suprématie souveraine d’Albert Pike ! Findel dixit ! »

Un religieux partit en campagne ; à la suite de ces belles déclarations de l’ineffable Findel. Il s’adressa aux journaux allemands qui avaient fait si bon accueil aux contre-révélations du haut-maçon de Leipsig. Ce religieux envoya partout un article, dans lequel il annonçait qu’il allait publier une brochure, lui aussi ; il se proposait de démontrer, mais en se plaçant sur le terrain catholique, que Findel avait raison. Findel avait attaqué l’Église en l’accusant de stipendier de faux révélateurs dans le but de calomnier la digne et toute pure Maçonnerie ; lui, il défendrait l’Église, en prouvant qu’en effet la Maçonnerie avait été calomniée, mais en prouvant par surcroît que ces calomnies étaient le fait de francs-maçons déguisés. On n’a pas tardé à reconnaître que ce pauvre religieux ne jouissait pas d’un cerveau bien équilibré ; il avait déjà donné des signes inquiétants ; ses supérieurs le firent taire, sa brochure n’a pas paru. Au Congrès de Trente, il fut déclaré qu’elle ne paraîtrait pas.