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aussi, il est lié avec les plus éminents maçons des États-Unis. Qu’il nous fasse l’éloge du F ▽ Frederick Webber, de Washington, et du F ▽ Nathan Lewin, de Charleston, tous deux trente-troisièmes et grands initiateurs des hauts-grades sans l’anneau ; il les connaît bien, n’est-ce pas ?

Hélas ! il n’est pas le seul qui sera, sans doute, invité à élever la voix contre moi. Ah ! pitié, pitié, ô mon Dieu ! — Et vous, amis lecteurs : prières !

V

La grande manœuvre, l’infâme, l’horrible Lemmi et son compère Crispi n’ont pas, autour d’eux, dans leur Conseil de l’Ordre, au Grand Orient d’Italie, uniquement des amis dévoués et admirateurs quand même ; plusieurs subissent le joug, mais en secret appellent de tous leurs vœux le mouvement maçonnique qui renverserait le grand-maître et son compère.

Ainsi, entre autres, le comte Luigi Ferrari, de Rimini. Je ne l’ai connu qu’au cours de mon avant-dernier voyage en Italie, et lui, il n’a pas su qui j’étais. Voici pourquoi :

Luigi Ferrari n’était pas palladiste, bien qu’il fût un des membres les plus actifs de la maçonnerie italienne. Il était inscrit à la Loge de sa ville natale, la L∴ Giovanni Venerucci, qui ne fonctionne plus, je crois, depuis quelque temps ; il faisait partie du Conseil de l’Ordre.

Lorsque le Palladium Indépendant fut constitué à Londres, et quand son organe-lien fut publié à Paris, Luigi Ferrari, à qui son ardent anti-cléricalisme n’avait pas enlevé une grande probité, et qui en sa conscience méprisait Lemmi et Crispi, se mit secrètement en relations avec le Comité Central de l’opposition palladique à l’élu du 20 septembre 1893. Il ne nous demanda pas d’être affilié aux Triangles : il s’offrit à être un de nos auxiliaires dans la Maçonnerie officielle avouée, pour préparer la chute du fripon du palais Borghèse et de son compère.

Son concours nous parut précieux. Accompagnée du F ▽ Sc., je me rendis en Italie, empruntant le nom d’une Sœur écossaise, palladiste indépendante, qui m’y avait autorisée ; à aucun prix, il ne fallait que la présence de Diana Vaughan dans la péninsule pût être soupçonnée, car il y avait déjà longtemps que j’avais été condamnée à mort par Lemmi. Je traitai avec Ferrari sous ce nom d’emprunt. Nous nous entendîmes sans peine : Luigi Ferrari était un homme entièrement désintéressé ; il se ralliait à nous par le seul motif de son dégoût relatif au chevalier de Marseille.

Me prenant pour une autre, il me pria de transmettre ses félicitations à Diana Vaughan au sujet de sa lutte ouverte contre Simon ; il regrettait de ne pouvoir en faire autant. Sa situation politique dépendait de sa présence au Conseil de l’Ordre, et il ne se sentait pas l’abnégation nécessaire pour la mettre sous pieds ; il en était fier pour sa famille.

Aux dernières élections législatives, il eut à soutenir le combat à Rimini, où les socialistes-révolutionnaires furent très violents contre