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Ce sont là autant de symptômes non équivoques et très expressifs de la possession.

D’abord, la double vue, alors qu’elle est constatée scientifiquement comme à Gif : la jeune fille parle devant témoins de choses qu’elle ne peut connaître ni comprendre avec son intelligence ordinaire.

Ensuite, la frénésie en présence des choses saintes, des ministres ou des objets du culte.

Enfin, le soulagement qu’a ressenti la possédée, à la suite des exorcismes, en prouve l’utilité.

Donc, la question de fait doit être résolue comme l’a jugée Mgr de Versailles.

Aujourd’hui, par suite de résultats heureux qu’un certain nombre de médecins ont obtenus par leurs traitements des maladies nerveuses et de l’hystérie en particulier, des expériences de laboratoire qu’ils répètent peut-être avec un peu trop de fracas, sans les multiplier autant que le public se l’imagine, — beaucoup se figurent que la possession et la grande hystérie sont identiques. C’est une erreur qui n’est pas moins théologique que scientifique. Il y a des possédés qui ne sont nullement hystériques. Il peut y avoir entre les uns et les autres des points de contact. Mais il y a encore plus de différences. L’état des uns relève du domaine moral ; l’état des autres, du domaine physiologique.


Point n’est besoin de faire ressortir la certitude, l’autorité, avec laquelle M. le chanoine Moreau s’exprime. Comme tout est précis, comme tout s’enchaîne dans son argumentation ! et pourtant, quand il parle au rédacteur du Matin, il ne connaît encore les faits que par les premières indiscrétions des journaux les moins sympathiques à l’idée chrétienne, c’est-à-dire de ceux qui ont eu pour but de donner le change à l’opinion publique. Mais, ministre d’une religion de vérité, il a saisi d’un simple coup d’œil la réalité de ce qui vient de se produire, et il a bien vite fait de remettre toutes choses à leur point. C’est ainsi que s’exprime la vraie science ; elle ne bafouille pas, comme le pédantisme des Salpétriers.

Bientôt, en effet, on sut à quoi s’en tenir ; M. le curé de Gif fut interviewé à son tour. Il entra dans quelques détails des faits, et, comme l’avait si bien dit M. le chanoine Moreau, il fut définitivement prouvé, aux yeux de tout homme de bonne foi, que Blanche Guyon avait été « victime d’une misère différente de l’hystérie. »

Je prends ici l’interview de l’Éclair ; de la sorte, on ne m’accusera pas de m’appuyer sur des journaux acquis d’avance à toute démonstration de la réalité du surnaturel. L’Éclair est, dans sa direction et sa rédaction, d’un scepticisme des plus connus ; et, dans la circonstance dont il s’agit, il lui a certes bien fallu sacrifier à l’actualité, pour qu’il se soit imposé la pénible charge de donner, dans ses colonnes, la parole à M. l’abbé Périer. Enfin, quoiqu’il ait pu en coûter à ses opinions person-