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se trouvant être un profane, se montre étonné de vos premières questions de tuilage…

Dans le jargon sectaire, tuilage signifie cet examen préliminaire dont le but est de s’assurer que l’on a affaire à un initié.

Il remonta dans son pousse-pousse, non sans m’avoir encore salué jusqu’à terre, après que, d’un ton de commandement, je lui eus dit de me conduire au temple des lucifériens de Pondichéry.

En route, il m’expliqua qu’il n’y a sur tout le territoire français aucune loge dépendant du Grand Orient de France ni du Suprême Conseil de Paris ; mais, en 1873, un Américain, qui s’était établi dans le district de Bahour comme grand fabricant de mousselines, et qui était membre correspondant du Grand Conclave de Baltimore (rite d’York), constitua une loge de ce rite, laquelle prospéra et donne chaque année de nombreuses initiations.

Le rite d’York est la branche anglo-américaine de la franc-maçonnerie universelle ; il est, comme tous les rites, divisé en diverses séries de grades ou degrés ; il y a les grades dits symboliques, pour les initiés vulgaires, les grades dits scientifiques, pour ceux que les chefs jugent dignes de recevoir un enseignement plus avancé, et les grades de chevalerie ou grades templiers, pour ceux qui sont destinés à pénétrer dans l’occultisme. Les ateliers (nom des groupes maçonniques) sont gouvernés, suivant leur série de grades, par une Grande Loge, un Grand Chapitre, ou un Grand Campement, ce dernier étant le gouvernement des ateliers de chevaliers templiers ; les Grands Campements, enfin, dépendent du Grand Conclave, lequel est la puissance suprême du rite et ne se compose que de francs-maçons du plus haut grade. Les divisions régionales du rite d’York, chacune avec son Grand Conclave, sont : l’Angleterre, l’Irlande, le Danemark, l’Allemagne, les États-Unis d’Amérique, le Canada et les colonies anglaises (centre directeur à Victoria). Avant de venir s’établir aux Indes, M. John Campbell, templier des États-Unis, avait fait partie du Grand Conclave de Baltimore, puissance suprême du rite pour l’Amérique du Nord.

La loge fondée par lui fut bientôt augmentée d’un chapitre de Royale-Arche et d’un aréopage de Templiers. Il se mit également en communication avec les Fakirs lucifériens, les recevant au Grand Campement de Bahour et allant à leurs réunions, avec ses frères haut gradés.

Quant à Ramassamipouno (etc.), il cumulait les grades des deux sectes, luciférien et templier d’York.

— Le frère Campbell, me dit-il, est à Pondichéry pour ses affaires ; il sera heureux de faire la connaissance d’un frère de Memphis ; je vais le faire prévenir.