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vérité sur l’affaire de la Banque d’Ancône, dont le récit a été publié avec un rare courage par M. Chantrel, dans les Annales Catholiques, numéro du 7 août 1886 ? Que de décès subits, au cours de ce procès aussi émouvant que mystérieux, et dans lequel étaient compromis plusieurs chefs de groupes cabalistes italiens !…

J’aurai, en donnant ce récit, d’autres divulgations à faire, non plus seulement sur les travaux criminels de cette pharmacie d’empoisonnements, mais aussi sur une propagande diabolique qui s’exerce dans les milieux pétris d’ignorance, en certaines contrées arriérées, propagande dont le but est de pousser aux plus odieux sacrilèges. C’est ainsi qu’en haine de Jésus-Christ les sectaires de l’occultisme moderne ont réussi à répandre au Brésil, dans les campagnes, une superstition monstrueuse. Le métis de la basse classe, qui en veut à quelqu’un, ne recourt pas à l’envoûtement, comme au moyen-âge, ni à la jettatura, comme de nos jours encore en Italie. Voici comment il opère : il prend un gros crapaud, de l’espèce du crapaud cornu, et il lui administre le baptême en lui donnant les nom et prénoms de la personne qu’il considère comme son ennemi ; après quoi, il fait avaler au batracien une hostie consacrée, qu’il s’est procurée par la communion à l’église ; le crapaud est alors enveloppé dans de la terre glaise et est ainsi enterré soit sous le seuil de la porte de l’adversaire détesté et maudit, soit à un endroit où il a l’habitude de passer tous les jours. Cette coutume, qui ne remonte pas à plus d’un siècle, est aussi répandue, en Europe, chez les paysans du Portugal et entretenue avec soin par les ennemis de la religion chrétienne ; toutefois, les Portugais se servent du crapaud de l’espèce vulgaire.

On ne peut, sans frémir, songer à bien d’autres pratiques, où le sacrilège joue toujours le premier rôle, et que les cabalistes modernes cherchent partout à introduire parmi les campagnards superstitieux. Pas bien loin de notre capitale, dans une petite localité nommée Bobigny, c’est-à-dire aux portes mêmes de Paris, on est parvenu à endoctriner les maraîchers qui vont chaque jour porter leurs légumes aux Halles ; ce village est un foyer d’occultisme ; les adeptes n’en sont pas encore aux sacrilèges, mais ils se livrent déjà à la nécromancie, avec accompagnement de blasphèmes dans leurs évocations. Dans un faubourg de Lille, appelé Fives, il y a aussi une société dite philosophique, dont le chef est à la fois perruquier et marchand de vins, lequel exerce une certaine influence sur les gens simples de la classe ouvrière ; ce perruquier philosophe, qui n’est pas dépourvu de prétentions politiques, est un simple luciférien déguisé en libre-penseur ; il réunit chez lui des hommes du peuple, les prêche et leur fait fouler aux pieds un crucifix, sous le prétexte que cela leur portera bonheur à bref délai.