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jour et nuit sans interruption ; on en cite qui durèrent jusqu’à sept jours, tant l’acharnement était grand des deux côtés.

Personne n’ignore, non plus, que les esclavagistes ne reculèrent pas devant le crime, lorsqu’ils se virent définitivement vaincus par les abolitionnistes.

Le général Lee, accablé par les forces de Grant, avait fait, mais en vain, un suprême effort à Burkesville, le 5 avril 1865, et le 7 il déposait les armes, acceptant une capitulation honorable que lui offrait le commandant en chef des armées fédérales. Les confédérés, dans leur rage, voulurent alors venger leurs échecs par l’assassinat même du président de la République.

Un acteur franc-maçon, du nom de John-Wilkes Booth, fut désigné dans les arrière-loges pour être le meurtrier. Le 14 avril, le président Lincoln s’était rendu au théâtre de Ford, à Washington, avec sa femme et deux amis ; on y jouait Our American Cousin. Au milieu du second acte, Booth parvint à s’introduire dans la loge occupée par Lincoln et le tua d’un coup de pistolet ; puis, écartant d’un coup de poignard un des amis du président, M. Rathburn, il sauta hors de la loge sur la scène du théâtre, en criant : « Sic semper tyrannis ! le Sud est vengé ! » Au milieu de la stupéfaction générale, il parvint à s’échapper et s’enfuit sur un cheval que les frères du Rite Écossais lui avaient tenu prêt.

Au même moment, un autre ultionniste frappait de cinq coups de poignard le secrétaire d’État de la République, M. Seward, qui était malade dans son lit.

Booth se sauva dans le Maryland ; mais, s’étant cassé la jambe en tombant de cheval, il s’arrêta pour se faire panser chez un chirurgien, le docteur Mudd, puis continua sa route. Cependant, sa piste était suivie ; on le trouva renfermé dans la grange d’une ferme ; et, comme il refusait d’en ouvrir la porte, ou introduisit par les fissures de la paille enflammée qui produisit un incendie. Finalement, il fut tué par une balle, au moment où il s’apprêtait à sortir, le pistolet au poing. Son cadavre, transporté à l’arsenal voisin sur le Potomac, disparut la nuit suivante, sans qu’on ait jamais pu savoir par qui ni comment il avait été enlevé.

Dans l’odieuse secte, le frère John-Wilkes Booth est considéré comme un martyr ; quant à ses restes, ils reposeraient secrètement à Charleston, au siège du Suprême Directoire Dogmatique, dans un mausolée souterrain situé au-dessous du Labyrinthe Sacré, si je m’en rapporte à un mot qui échappa à Jonathan Chambers dans une de ses conversations avec moi. Mais, ceci m’ayant été dit lors de mon dernier voyage à Charleston et tandis que Chambers me raccompagnait à la gare, je n’ai pas eu la possibilité de vérifier.